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Journaliste depuis 30 ans, à la fois spécialiste des pays en proie à des conflits et des questions d'écologie,de protection de la nature et de société; derniers livres publiés: Guerres et environnement (Delachaux et Niestlé), L'horreur écologique (Delachaux et Niestlé), "La Grande Surveillance" (Le Seuil),une enquête sur tous les fichages (vidéo, internet, cartes bancaires,cartes médicales, telephone, etc). Et enfin "Enquête sur la biodiversité" (ed Scrinéo, coll Carnets de l'info). Aprés 20 ans au Journal du Dimanche, collabore désormais à l'hebdomadaire Politis et à Médiapart.

vendredi 2 février 2007

Tous de plus en plus verts

2 février

Jean-Marie Le Pen est le seul candidat potentiel, ou possible, à l’élection présidentielle à ne pas avoir encore fait semblant de faire l’écolo. Cette erreur ne doit être qu’une simple distraction due à l’âge et à sa peur des Rouges. On ne reviendra pas sur le cas du toujours vert président de la République qui, même sans l’aide de Nicolas Hulot, continue sur sa lancée, comme un disque rayée que nul n’a songé à arrêter, et continue à nous promettre des lendemains écologiques : entre pétrole vert pour ses amis gros agriculteurs et centrales nucléaires en vente libre dans une Chine que chacun aide à retarder le moment où elle pourrait être submergée par la démocratie.

Villepin (de) a lui aussi fait réchauffer quelques vieilles soupes vertes avec une taxe sur la charbon ( ?) et des promesses de taxations écologiques qui n’engagent que les patrons d’entreprises qui ont fait semblant de le croire en faisant mine d’avoir peur. Ce qui ne peut excuser Laurent Fabius de se croire écolo depuis qu’il nous a raconté dans un livre qu’il mange de temps à autre des carottes râpées et depuis qu’il s’est fait prendre en photo avec José Bové. Histoire de nous faire oublier, sans doute, qu’il a autrefois mené la vie dure à Huguette Bouchardeau quand elle fut ministre de l’Environnement il y a une vingtaine d’années. Mais, bon, oublions puisque les militants socialistes l’ont renvoyé à sa campagne normande. D’ici à la prochaine présidentielle, il aura le temps de se remettre au vert. Je ne cite que pour mémoire Dominique Strauss-Kahn qui, de temps à autre, pendant sa campagne rose, a prononcé le mot environnement comme on profère un gros mot. Il ne faut évidemment pas oublier les allusions environnementales du Béarnais du milieu, l’ami du député UDF Lassale qui pourfend l’ours, le célèbre Bayrou (prononcer Baïrou pour ne pas le rendre vert de rage) en équilibre instable sur une branche entre la gauche et la droite ; qu’il dit… Il semble penser que faire de l’environnement lui permettra d’escalader les sondages et finira par nous faire croire qu’en tant que « produit de pays », il est intégralement « bio » . Lui et d’autres devront faire oublier qu’il y avait dix députés en séance pour discuter du minable budget du ministère de l’Ecologie…

Nous nous retrouvons donc dans la même situation qu’à la fin des années 80, quand les Verts de nuances diverses ayant engrangé des voix, ont réveillé provisoirement les « consciences vertes » des partis traditionnels. Tous les politiques entendent des voix quand on leur parle d’écologie. Ce qui avait eu et a aujourd’hui, pour effet, de réveiller également les patrons de journaux découvrant, je m’en souviens, que les sujets nature et environnement pouvaient peut-être intéresser les lecteurs. Cela ne va pas durer.

Reste nos deux héros, Ségo et Sarko. Pour le second, les mots et les phrases sont presque là. Tout au moins brièvement dans le discours, car dans le programme de son organisation, cela ressemble à un désert touché par le réchauffement climatique. Tout le monde a oublié que le ministre de l’intérieur qui veut nettoyer nos rues (ça c’est écolo, coco !), s’est prononcé contre toutes les taxes écologiques quand il était ministre de l’Economie et des Finances, taxes dont il a maintenant (re)découvert les vertus. Ses députés, comme çà, pour rire, pour se défouler, ont réduit de moitié les faibles subventions de la loi de Finances destinées à l’ours des Pyrénées. Lui aussi se figure qu’il a suffit de dire de serrer la main de Nicolas Hulot pour attraper la main verte et qu’il s’agit d’un antidote à la fréquentation des chasseurs. Reste donc Ségolène Royal : elle fut ministre de l’environnement et a signé en dix pages la « chartre Hulot » en connaissance de cause. Mais ajoutons pour compléter, que pour proposer une société plus verte et moins destructrice, elle devra beaucoup tordre le programme de son parti. On verra, mais notons que, pour l’instant, à chaque fois qu’elle parle d’environnement et d’écologie, les journalistes politiques qui la suivent, oublient d’en rendre compte. Parait que « ça fait province, Poitou-Charentes ». Et puis les « petites phrases » sur l’environnement, c’est bien moins facile à caser que les éventuels ricanements assassins sur les « autres ».

Cela pourrait changer. Pour elle comme pour les autres car s’il y a de la voix à prendre, les promesses vont naturellement fleurir bien avant le printemps. Je m’attends à un véritable déferlement de bonnes résolutions qui vont s’étaler dans nos journaux. Comme dans les années 80, comme autrefois. Une verte campagne nous menace : pour imiter Nicolas Hulot, pour ramasser une brindille des 10% que lui promettaient des sondages, tous les candidats vont tout nous repeindre en vert. Il y en a déjà plein mon courrier de journaliste. Tous indifférents à la contradiction en les promesses de croissance et les promesses de moindres dégâts pour la nature et l’environnement.

Je crains le pire : le temps du parler pour ne rien faire est de retour. Car ils vont nous promettre des autoroutes vertes, des usines vertes, des centrales nucléaires vertes, du maïs Géant vert et OGM, des paysans verts, des rivières vertes, de l’électricité verte, des tomates vertes et des fruits verts. Et des ministres verts, évidemment. En attendant les politiques ne nous parlent que de climat, ce qui leur évite d’évoquer les autres problèmes d’environnement au moins aussi graves : des pollutions à la diminution de la biodiversité en passant par le gaspillage énergétique.

José Bové va peut-être nous rafraîchir les idées et l’espoir en rappelant que les agriculteurs devraient tous être au service de la nature et non pas de l’agro-business.

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