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Journaliste depuis 30 ans, à la fois spécialiste des pays en proie à des conflits et des questions d'écologie,de protection de la nature et de société; derniers livres publiés: Guerres et environnement (Delachaux et Niestlé), L'horreur écologique (Delachaux et Niestlé), "La Grande Surveillance" (Le Seuil),une enquête sur tous les fichages (vidéo, internet, cartes bancaires,cartes médicales, telephone, etc). Et enfin "Enquête sur la biodiversité" (ed Scrinéo, coll Carnets de l'info). Aprés 20 ans au Journal du Dimanche, collabore désormais à l'hebdomadaire Politis et à Médiapart.

dimanche 20 décembre 2009

Le mauvais climat d'une conférence de Copenhague qui a encore plus mal fini que les précédentes

Dimanche 20 décembre

Chronique publiée sur Mediapart (www.mediapart.fr)

En comparant les résultats –mot un peu fort- de Copenhague avec ceux de Stockholm en 1972 et même de Rio de Janeiro en 1992, il est hélas possible de mesurer le recul de la qualité des réactions de ce qu’il est convenu de nommer la communauté internationale face aux périls que nous avons créés et ensuite entretenus. Les discours s’améliorent, les chefs d’Etat font semblant de se passionner pour l’écologie et son dernier avatar, le climat, mais dans les actes, la régression s’affiche et s’aggrave sans vergogne. Le protocole de Kyoto qui s’imposait d’abord aux nations industrialisées et qui aurait pu s’appliquer aux grands pays émergeants, n’existe plus. Oublié alors qu’il aurait fallu le renforcer. Les discours de plus en plus flamboyants répondent à la pression de la société civile et des associations tandis que les actes expriment la montée des égoïsmes nationaux qui s’affrontent de plus en plus brutalement. En écrasant la plupart des pays du sud dont les représentants, à quelques exceptions prés, n’ont pas brillé d’intelligence et de créativité au cours de ce sommet. Pour un Evo Morales qui a utilisé un langage nouveau en phase avec les menaces qui pèsent sur le milieu naturel et les hommes, combien de discours convenus et geignards, combien de pales copies des fausses jérémiades des responsables de pays riches oubliant en plus que dans leurs propres populations, les plus pauvres subiront en premier les effets des modifications climatiques dans leurs vies quotidiennes. Et les grandes associations se voient prises au piège de leur illusion : radicales ou centristes, elles ont cru être reconnues et écoutées alors qu’elles n’ont été que flattées et incluses dans une stratégie de communication qui, pour la France, a culminé à l’Elysée où le président de la République qui leur a servi l’inusable « Je vous ai compris ! ». Version française de bien d’autres escroqueries aux sentiments écologistes joués aux Etats Unis, en Grande-Bretagne, en Allemagne, en Australie et même en Inde comme l’explique Darryl D’Monte, le président des journalistes environnementaux indiens qui critique vigoureusement son gouvernement de sacrifier le présent à l’avenir.
La communication qui a pris les commandes de l’écologie officielle vient de se révéler impuissante à régler les problèmes par la magie de la parole alors que dans les grandes conférences du passé, les chefs d’Etat n’avaient pas osé se séparer sans décision. Nicolas Sarkozy et ses semblables n’ont plus le pouvoir de casser le thermomètre de la planète mais ils se vantent quand même de calmer nos angoisses en nous expliquant que demain, certainement, ils règleront gratis les maux de la terre avec des mots puisqu’ils ont avoué qu’ils n’avaient rien d’autres à nous proposer. Les responsables du Bangladesh ou des iles-Etat parlent d’escroquerie et se demandent comment ils vont empêcher la mer de les submerger. Mais que pèsent les 10 000 habitants de Tuvalu et les dizaines de millions de pauvres en danger du delta du Brahmapoutre face aux intérêts du monde industriel et financier ?
La démocratie planétaire et onusienne, comme d’autres formes de démocratie, ne fonctionne plus, même comme placebo. Alors que longtemps elle avait fait illusion. Retour sur Stockholm où l’on décida en une dizaine de jours de créer le Programme des Nations Unies pour l’Environnement, le PNUE, auquel il aurait suffit de donner plus de pouvoirs et le droite de distribuer les moyens financiers d’agir. Le seul organisme ayant la mémoire des questions et des urgences environnementales depuis prés de 40 ans a été le grand absent des discours et de la vague déclaration finale bricolée par une trentaine de pays qui n’ont même pas osé se présenter devant les autres et se sont enfuis comme des voleurs d’avenir. On comprend à la fin, si l’on n’avait pas deviné avant, pourquoi les militants de l’écologie présents à Copenhague ont été brutalement écartés trois jours avant la fin de la conférence. Il est difficile de convoquer des témoins quand on s’apprête à commettre un crime contre l’humanité. A Stockholm il avait été décidé par toutes les délégations présentes que le PNUE devait « prévoir les moyens de susciter et d’utiliser la participation active des citoyens et la contribution des organisations non gouvernementales à la sauvegarde et à la mise en valeur de l’environnement. Et d’associer le public à la gestion et au contrôle de l’environnement ». Cet accord est parait il toujours en vigueur...et la formule inventée à l’époque par les Nations Unies et la société civile « nous n’avons qu’une seule terre » reste le slogan du PNUE...
Sera-t-il vraiment nécessaire de se rendre à Mexico où, dés le début, annonce de l’échec vainement mis en scène, il était déjà prévu d’organiser COP 16 comme en témoigne le stand de cette ville où, dés le début de la réunion à Copenhague de COP 15, comme en témoigne un stand installé prés de l’assemblée des délégués, où il était possible de commencer à chacun de préparer son voyage au Mexique pour une nouvelle conférence « historique ».

La nature et la biodiversité grands oubliés de la défunte conférence climat de Copenhague

SAMEDI 19 DECEMBRE

CHRONIQUE PARUE SUR MEDIAPART

Messieurs qu’on nomme grands, messieurs les présidents, je vous fais une lettre, que vous lirez peut-être si vous avez le temps ; en quittant Copenhague dans une dernier panache de CO2. Hier pour les moins pressés d’en finir avec un rituel climatique qui vous ennuie énormément au delà de vos discours convenus et rarement inconvenants et aujourd’hui pour ceux qui ont voulu faire illusion jusqu’au bout.
Nous serons nombreux à la signer, cette lettre, désespérés par votre indifférence et votre ignorance. Nous la signerons avant de mourir peut-être ou avant d’être parqués, pour la culture des générations futures, dans des réserves dites, par anti-phrase, naturelles, alors qu’elles contribuent à artificialiser l’espace naturel en y alignant les survivants. Nous la signons au nom des 8500 espèces menacées de disparaître bien avant que vous vous réussissiez à vous mettre d’accord pour bloquer ou casser le thermomètre et bloquer les tempêtes ; bien avant que vous ne cessiez de vous fixer une base de 2° en plus à ne pas dépasser en feignant de croire qu’il n’existe pas des pays ou des régions dont la température moyenne a déjà augmenté bien au delà. Dans l’Arctique ou en Afrique. Nous, à la différence des hommes qui souffrent, nous ne demandons pas de l’argent, juste un peu d’attention et quelques gestes pour la planète. Sans feindre de croire, comme les présidents français et américains, que dans chaque pays on installera des « thermomètres » témoins.
Les cigognes, les blanches comme les noires, se demandent où elles vont désormais passer l’hiver puisque l’Espagne, la France, le Mali et le Maroc viennent de s’attribuer le pouvoir de décider de l’année à partir de laquelle ces pays qu’elles fréquentent décident que la température n’augmenterait que deux degrés. Qui leur lira une nouvelle feuille de route ? Qui les guidera ? Qui réglera leur GPS sur la bonne latitude, qui les aidera à ne pas mourir de faim ou de soif ? Qui sauvera le lion dans a savane brûlée ?
Les ours blancs, agrippés à leurs derniers glaçons qui baignent dans de l’eau trop tiède lèvent la tête en vain vers le ciel. En se demandant qui viendra les empêcher de couler en même temps que les banquises sur lesquelles ils dérivent avec les derniers de leur espèce.
Qui dira où les oies des moissons, comme ces dernières changent sans arrêt de période, devront se poser avant d’être fatiguée à en mourir. Parce qu’elles s’épuisent à errer, parce qu’elles se nourrissent de plus en plus mal. Comme l’outarde capelière qui disparaît dans la plus grande indifférence parce qu’elle ne sait plus à quel temps se vouer.
Comment faire pour le loriot, le chardonneret, les hirondelles dont les effectifs ont chuté de 40 % depuis une vingtaine d’années, ou la mésange charbonnière qui peine à nourrir ses petits parce que le printemps vient trop tôt? Comment faire pour que ces oiseaux et bien d’autres ne perdent pas le Nord ? Qui s’occupera de trouver des chenilles pour le gobe mouche à son retour d’Afrique pour qu’il ne meure plus de faim parce qu’il arrive désormais trop tard après leur naissance ? Faudra-t-il bientôt organiser des charters pour renvoyer en Egypte le vautour blanc des Pyrénées qui veut s’installer définitivement chez nous ? Qui osera dire que, quand même, la France ne peut pas accueillir toute la misère aviaire de la planète ?
Qui sauvera les centaines d’espèces de poissons piégés dans les rivières du monde qui s’assèchent, en Afrique, en Inde en Argentine comme dans le Poitou ? qui leur donnera asile ou un peu d’eau pour ne pas disparaître? Et les grenouilles et les tritons et les salamandres, tous ces amphibiens qui périssent aussi faute d’eau ? Qui s’alarme pour les papillons dont le monde perd chaque année une cinquantaine d’espèces ?
Comment sauver les 12 000 espèces de plantes et d’arbres menacées de rapide disparition et qui va pleurer sur leur sort ? Certainement pas vous, messieurs que l’on nomme grands puisque vous ne réussissez même pas à sauver les grandes forêts ? Qui dira la tragédie de la disparition des plantes médicinales des pays du sud et des pays du nord qui ne peuvent même pas demander l’asile ailleurs ? Qui va aider les chênes à partir vers le nord de la France pour ne pas disparaître ?
Monsieur le président, qu’avez vous décidé, qu’avez vous prévu pour sauver les onze mammifères français sur le point de disparaître ? Et quel monument sera élevé aux 1160 espèces d’animaux disparus dans le monde depuis 60 ans ? Peut-être leur épitaphe est-elle déjà contenue dans Convention internationale sur la biodiversité adoptée en 1992 à la conférence de Rio en même temps que la Convention cadre sur les changements climatiques (signée par 131 pays) auprès de laquelle les pseudos accords d’hier ne sont qu’une bien pâle copie même pas paraphée.

Lette rédigé par un panda qui ne trouve plus de bambou à grignoter alors qu’il lui en faut au moins 15 kilos par jour.

Le cri d’Evo Moralés sur la mort de la Mère nature, sur la disparition de la biodiversité, disparition qui concerne aussi bien la beauté du monde que son équilibre pour les êtres humains n’a pas été entendu. Pas un instant les maîtres du monde ne se sont intéressés à la nature mise en danger par les modifications climatiques. Ayant posé la question successivement à un délégué anglais, à un délégué polonais, à un délégué australien et à une déléguée panaméene j’ai compris aux regards étonnés que je passais pour une simple d’esprit, que la question ne se posait pas. Effectivement
Je sais, il s’agit, enfin il s’agissait, des hommes, de l’avenir de l’humanité, de la détresse de nombreuses populations. Mais qu’est elle, que sont ils, que sommes nous sans cette nature et sa biodiversité ?
Trop tard, la conférence est terminée et les présidents sont soulagés de retourner à des affaires sérieuses et le dernier panda, privé de bambous détruits par la sécheresse, disparaîtra dans l’indifférence. C’est vrai ça : il sert à quoi le panda ?

mercredi 16 décembre 2009

Repression et arrestations au sommet du climat de Copenhague


Mercredi 15 décembre

De façon à écarter le maximum de représentants de la société civile du déroulement de la Conférence sur le climat, les officiels de l'ONU et la police danoise se sont mis d'accord pour...mettre au frais un maximum de membres des associations qui veulent témoigner de l'échec des négociations.

Quand les Nations Unies font reculer la démocratie à Copenhague

Mardi 15 décembre

Chronique parue sur Mediapart hier (mediapart.fr)

La démocratie onusienne réduit considérablement au lavage de cerveau. Fermement décidés à persuader tout le monde et le monde entier que tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes, que tous les pays s’aiment, que les congressistes ne sont qu’une bande de chics copains juste séparés par des malentendus provisoires et accessoires, que les délégations vont se mettre d’accord en s’embrassant goulûment avant l’arrivée des chefs d’Etat, les responsables des Nations Unies se donnent les moyens de réduire les risques de mauvaises interprétations, de critiques ou de commentaires acerbes des orages (souvent tropicaux) qui secouent le sommet du climat. La conférence de Copenhague se ferme et se verrouille dans un autisme aussi imprévu que sans précédent.
Les gentils organisateurs restreignent de plus en plus l’accès de la presse aux assemblées plénières, ce qui n’est pas dans la tradition des grandes conférences où seules les réunions informelles sont habituellement fermées aux journalistes. De plus, à l’instigation de leurs services de sécurité, les Nations Unies ont décidé de réduire la composition de toutes les délégations d’associations dûment accréditées de 80% à partir du 15 décembre: vous étiez cent, vous ne serez plus que vingt ! Cela ne se discute pas ! Plus question donc, que ces gens, pas toujours fiables, se pressent en trop grand nombre au Bella Center, les bâtiments de la conférence officielle. De peur qu’ils manifestent à l’intérieur, qu’ils sortent des pancartes vengeresses et qu’ils importunent des ministres. Il ne faudrait pas, par exemple, que Jean-Louis Borloo, qui passe son temps à parcourir les salles d’un pas vif, comme un prince d’autrefois dans les couloirs de Versailles, suivi d’une bruissante cohorte de journalistes et de courtisans, court le risque d’être interpellé dans sa parade triomphante par un écolo malpoli qui jugerait, par exemple, qu’il ne consacre ses efforts qu’à la communication et à la mise en scène des idées françaises alors que c’est l’Europe qui est censée parler. Il parade pour masquer un échec prévisible et pouvoir raconter ensuite que la France aura été exemplaire mais (malheureusement) incomprise. Donc, la demande émanant également de nombreux ministres qui ne veulent pas être dérangés et faire tranquillement le ministre, l’essentiel des associatifs, pourtant des gens bien polis, pas les pouilleux de la manifestation, sont virés. Sort qui a failli être celui des députés Verts européens, José Bové par exemple, qui n’ont du leur salut qu’à une astuce et au désistement d’autres membres de l’association mondial des Verts. Circulez, il n’y a plus rien à voir.
Cette mise à l’écart spectaculaire, inédite de mémoire d’usagers de conférence, promet des protestations et un désordre indescriptible à l’entrée du centre de conférence à partir de ce matin. Déjà aujourd’hui, parce que, assister à la Conférence de Copenhague est quand même ce qui se fait de plus chic avant d’aller au ski, l’accès a été bloqué pendant des heures par des centaines de personnes désireuses de venir faire un tour avant l’épuration associative et celles qui suivront pour que les excellences magouillent tranquillement. Pendant deux heures, la station de métro du Bella Center a été fermée. On imagine Madame Royal faisant la queue dehors ce mardi comme un vulgaire diplomate indien l’a fait hier pendant six heures.
L’affaiblissement d’un processus démocratique déjà bien incertain est renforcé par la multiplication des conciliabules. Lesquels ont amené les pays africains à se fâcher et à refuser de discuter (d’où le huis clos pour que les engueulades ne s’entendent pas trop). En fait, notamment sur le maintien ou la disparition du protocole de Kyoto, dont les pays industrialisés veulent se débarrasser, les coups et les tentatives de débauchages ont volé très bas depuis samedi soir. Beaucoup d’Africains ont été choqués des méthodes utilisées ; et confirmant les informations données hier par Mediapart, Pablo Solon, l’ambassadeur de la Bolivie à l’ONU, a, si l’on ose dire, mis les pieds dans le plat : « Nous exigeons un retour à une discussion démocratique, nous avons désormais l’impression que l’essentiel des négociations se déroulent désormais au cours de petits dîners auxquels sont conviés des invités soigneusement sélectionnés. Les responsables des Nations Unies ne peuvent pas ainsi choisir ceux avec lesquels ils parlent dans un processus qui n’a plus rien à voir avec la démocratie. Nous en appelons à toutes les forces sociales et écologiques pour dénoncer cette dérive ».
Les tensions sont manifestes à deux jours de l’arrivée des chefs d’Etat qui sont déjà nombreux à s’irriter du blocage des discussions et de la résistance des « pauvres ». Des consignes ont donc été données, notamment par la France, de la Grande-Bretagne et des Etats-Unis, pour que les textes et les discussions soient de plus en plus verrouillés et que cessent les remises en cause de ce qui a été décidé par l’ONU et quelques grands pays.

lundi 14 décembre 2009

les hommes en gris vendent la terre au plus offrant et méprisent les manifestants de Copenhague

Lundi 14 décembre

Aprés la manifestation...


En juin 1972, à la conférence de Stockholm des Nations Unies sur l’environnement, quand pour la première fois des milliers d’écologistes et de hippies ont défilé et revendiqué avec les représentants des Peuples Premiers, les indiens, les Lapons, les Inuits ou les Aborigènes d’Australie, ils ne trouvèrent que quelques policiers débonnaires pour les empêcher gentiment de rentrer dans les bâtiments officiels. Et le patron de la Conférence, le Canadien Maurice Strong s’était avancé sur le haut de l’escalier, avait demandé un micro et il s’était directement et amicalement adressé aux manifestants réclamant des décisions plus énergiques pour sauver la planète de la pollution, des destructions, de la déforestation, du massacre de la nature et déjà du réchauffement climatique. Ils avaient discuté avec acharnement, échangé vivement mais en restant sur la même planète. Je me souviens même que, dans un geste peut-être machinal, il avait fini par lever le poing pour répondre à l’ovation des manifestants. Plusieurs ministres et négociateurs de petits et grands pays l’avaient rejoint et s’étaient également adressés à la foule. A l’intérieur, les travaux avaient été suspendus pour que tous puissent venir accueillir un cortége bigarré aux premiers rangs desquels figurait comme aujourd’hui des Africains, des Indiens et des Lapons : un esprit, association du développement, du social et de l’écologie qui a fait un retour remarqué samedi, toutes les revendications, y compris celles des peuples exploités, étant à nouveau confondues comme en ce début des années 70 où la conférence inventait un slogan : « l’écologie, c’est de la politique ».
Autres temps, autres moeurs dans les rues de Copenhague. D’abord, pour encadrer 80 000 manifestants, prés de 10 000 policiers armés jusqu’aux dents et habillés, comme partout, comme des figurants pour un mauvais film de science-fiction. Il y en avait même devant le seul Mac Do du parcours. Impossible d’approcher du Centre de conférence isolé par plusieurs kilomètres de grillages mis en place dans la nuit. La scène devant laquelle se sont succédés les orateurs et arrêtés les manifestants était exilé à 600 mètres du Bella Center où les experts, les diplomates et déjà quelques ministres ne se sont même pas arrêtés d’évaluer les virgules du mauvais texte dont il disent tous, sauf les Etats Unis et la Chine, que c’est la plus mauvaise des conclusions possibles à la bataille diplomatique qui se poursuit en coulisse. Ils ont vaguement regardé la télé, comme on contemple le spectacle d’une autre planète, mais alors qu’ils auraient parfaitement pu le faire, même discrètement, par l’avenue désertifiée par la police, ils se sont jamais « venus voir ».
Mais surtout, l’incroyable, l’insupportable, ces hommes en gris qui nous servent tous les jours de grises, ternes et ratiocinantes conférences, ne sont venus tenter d’expliquer et de s’expliquer devant les manifestants. En dehors d’Yvo Boer, le Néerlandais secrétaire exécutif de la Convention climat, venu débiter rapidement et sans sourire ses platitudes habituelles mais renforcés à la langue de bois durable. Pas de mouvement, pas de sortie en masse pour dire, comme le fit Maurice Strong à Stockholm, que les politiques comprennent leurs inquiétudes, voire que rien n’est simple ou que les égoïsmes nationaux dominent les débats. Rien. Pas de regard vraiment intéressé pour cette population, pour ce peuple de jeunes enthousiastes et sincèrement angoissés. Pas même un communiqué pour remercier ces pèlerins du climat d’être venus de loin. Rien qu’un mépris glacé ou la peur d’affronter des jeunes aussi « étranges » vivant dans un autre monde.
Il y a eu par le passé des conférences où les officiels, malgré leurs différents, tentaient vraiment d’esquisser un dialogue, même rugueux. Ainsi à Seattle, au sommet de l’OMC coulé par la contestation, malgré l’énormité de la pression de la foule, malgré les heurts, malgré les incidents, on vit Pascal Lamy, le patron de l’organisme et quelques autres, nouer une polémique avec ceux qui ne voulaient pas de son sommet. Propos vifs, mais échanges. Ce fut même encore un peu le cas à Johannesburg en 2002 ou des ministres s’empoignèrent dans des joutes sévères avec la piétaille de la société civile. Comme dix ans plus tôt à Rio de Janeiro. Mais cette annéee, c’est fini, on ne mélange plus les torchons et les serviettes.
Samedi, il ne s’est rien passé : « business as usual », plus exactement «business vert as usual ». Les politiques et surtout les technocrates du climat, la tête déjà dans le prochain sommet qui se déroulera à Mexico, la seule certitude du grand marchandage en cours, n’ont ni eu l’idée, ni eu l’envie de rencontrer la jeunesse et les représentants des peuples qui souffrent. Ceux qui leur disent : « pour la planète, cherchez pas, il n’y a pas de Plan B »

vendredi 11 décembre 2009

Toujours en direct de Copenhague et avec la passion qui renait chez les militants

Samedi 12 décembre

Copenhague, juste avant la manifestation


« Nous venons de la terre, nous y retournons tous, nous devons donc la respecter, cette vérité figure désormais dans notre Constitution. Et je vous rappelle que le changement climatique n’est pas une crise mais un symptôme » expliquait hier Elisabeth Peredo, représentante de la Bolivie au Forum des associations, à plusieurs kilomètres de la Conférence officielle qui sombre dans l’ennui et les manoeuvres mesquines. Tactique habituelle des « grands » qui cherchent à déstabiliser les « petits » et à leur faire sentir un certain mépris. Quelques minutes plus tard, venue de cette conférence (des parties...) porteuse d’une rage et d’une fureur d’expliquer que les débats auxquels elle participe étaient tout sauf de la démocratie, Angela Navarro, autre bolivienne et surtout négociatrice pour son pays, enflammait une salle immense du Forum en rappelant que « la lutte pour sauver le climat est une lutte pour la vie, une lutte pour Ayaya Pacha Mama, notre mère la terre ; une quarantaine de pays riches n’ont pas le droit d’imposer leurs lois à tous les autres, aidez-nous, mobiliser vous, criez le. Nous ne sommes pas venus mendier mais, avec beaucoup d’autres, nous demandons réparation, nous venons réclamer ce qui nous est du, le remboursement de la fantastique dette écologique, la dette des pillages de nos richesses, la dette du changement climatique dont nous souffrons mais que nous n’avons pas provoqué, la dette des droits de la nature mutilée. Ne laissez pas quelques pays essayer de sauver le climat sur notre dos, manifestez encore et toujours, faites entendre votre voix jusqu’à la conférence, faites pression pour apprendre la démocratie à tous ces gouvernements qui se moquent de nous !». Longue ovation.
Alors qu’Angela repart pour la conférence officielle pour, explique-t-elle, sauver ce qui peut encore l’être, le Climaforum mis en place par les Danois pour tous les voyageurs du climat, vient enfin de basculer dans l’émotion. Les auditeurs vibrent et s’enflamment avec les « avocats » de la dette climatique et écologique, le sujet de la journée. Comme si, de la tribune où un Malien explique qu’il a « vu disparaître les saisons », à la salle essentiellement remplie de jeunes d’où fusent les questions, un nouvel esprit venait d’éclore ou de se révéler. Une mutation magique due notamment à plusieurs femmes passionnées, un embrasement des esprits qui annonce peut-être le ton de la manifestation de samedi, la transformation soudaine d’une mobilisation un peu routinière en une exaltation qui dépasse les préoccupations partisanes des uns ou des autres, qui les fait sortir de leurs stands et de leurs distributions de tracts. Avec une sorte de fusion avec les jeunes routards de l’écologie qui commencent à débarquer par milliers dans la ville avec d’énormes sacs à dos. Sous la pluie.
Il y a ainsi, parfois de ces instants magiques dans un rassemblement de militants face aux puissants, le moment où ils commencent à croire qu’ils ont un pouvoir ou le pouvoir. Loin, finalement, de leurs responsables qui continuent de négocier pied à pied dans les couloirs de l’autre conférence avec l’espoir d’améliorer un texte pour l’instant accablant de platitudes. Il y eut des moments de ce type, magnifiques, lors de la première conférence des Nations Unies sur l’environnement de Stockholm en 1972. Au moment où, comme hier, des négociateurs, des diplomates, voire de ministres atterrés par l’immobilisme ou les indifférences de leurs homologues étaient venus en appeler aux militants et aux associations. Avec comme résultat de réussir à faire modifier des textes et des résolutions que tout le monde croyait graver dans le marbre de la médiocrité et du consensus. Dans ces circonstances on a parfois l’impression que le pire n’est pas certain...
Cette magie de la foule et du verbe tendrait à prouver que les politiques qui ne vivent que de compromis et de marchandages restent parfois à la merci de la naissance des émotions et des actions militantes. Ce qui arriva à Seattle aux Etats Unis en 1999 lorsque des associations et des militants, par le verbe et la rue, ont réussi à mettre en déroute la conférence de l’Organisation Mondiale du Commerce que tout le monde pensait bien installée sur les rails d’un ultralibéralisme destinée à asservir, économiquement parlant, les pays du Sud. Un « accident » dont l’OMC ne s’est toujours pas remise.
Beaucoup de ces rassemblements, depuis qu’ils sont suivies ou surveillés par des militants, connaissent ces moments de grâce qui peuvent faire croire que, soudain, peut-être, tout est possible. Surtout quand la conférence officielle sombre dans la médiocrité.

Avant la manifestation de Copenhague, deux ou trois choses de que je sais de la conférence

vendredi 11 décembre

Copenhague, le 10 décembre

Une conférence internationale, fut-elle entourée et surveillée par quelques milliers de citoyens vigilants ne doit pas grand chose à l’improvisation ; contrairement à ce que les déclarations des uns, les promesses nouvelles ou les fausses improvisations des autres ou de Jean-Louis Borloo pourraient laisser croire. Depuis des mois, ainsi le veut le mécanisme des consensus internationaux, des experts scientifiques, économiques et politiques, se réunissent discrètement pour rédiger un projet d’accord. Lundi, quand le show médiatico-politique a commencé, tout était déjà écrit. Il ne reste plus, essentiel du travail politique au cours duquel l’expertise des scientifiques est peu à peu écartée, qu’à examiner, ligne par ligne, mot par mot, souvent virgule après virgule toutes les parties du texte qui figurent entre crochets. Pour avoir été, par deux fois, à Rio et lors de l’une conférence de l’après-Kyoto, amené à assister à ces interminables et fascinantes discussions de marchands de tapis, je sais à quel point les empoignades sont sévères autour des détails. Dans les réunions formelles et informelles, les délégués et leurs adjoints doivent à chaque instant s’assurer que les traductions ne cachent pas une entourloupette, un faux sens que l’un ou l’autre des pays pourra ensuite saisir pour clamer que seule sa version est la bonne. Tout cela, au rythme confus des « services rendus » ou à rendre que les délégations échangent dans ce qui ressemble souvent à une foire au troc du XIX éme siécle. Depuis quelques semaines, par exemple, les Etats-Unis vendent chèrement, y compris pour des promesses afghanes, le moindre point de diminution d’émission de CO 2 ; tout comme la Chine est prête à troquer des exportations de jeans contre le renoncement à quelques de nouvelles centrales à charbon.
Cette pièce de théatre va durer jusqu’à l’arrivée progressive des ministres puis des chefs d’Etat ou de gouvernements ; les négociateurs s’échappent régulièrement des salles de réunions formelles ou informelles, celles où les textes avancent et celles où se lancent les ballons d’essai, pour rencontrer tous les groupes de pression qui campent devant les portes fermées. A toute heure du jour et surtout de la nuit, quand, grâce à la fatigue, les vigilances politiques ou techniques peuvent faiblir ou s’endormir. Même les ministres peuvent se précipiter dans les couloirs pour tester un chiffre, voire un adjectif. Je me souviens par exemple, à la conférence de La Haye en novembre 2000, avoir vu Dominique Voynet surgir dans un couloir une feuille à la main, l’air victorieuse avant de se voir expliquer par un représentant des Amis de la Terre, qu’elle était en train de se faire rouler dans la farine. Il s’agissait ni plus ni moins, cette année là, que de trouver un accord sur la mise en oeuvre des accords de Kyoto pourtant présentée trois ans plus tôt comme une « victoire de la planète ». Ce qui permet de mesurer à quel point les accords ne sont souvent que des faux semblants, des galimatias destinés à faire à plaisir à tout le monde. A la Haye, il s’agissait, comme aujourd’hui, de régler le conflit entre les Etats Unis minimalistes du climat suivis par l’Australie, la Nouvelle Zélande, le Japon et le Canada ? et l’Europe se donnant le beau rôle en proposant un organisme supra-national de contrôle des engagements auquel la plupart des pays européens ne croyaient pas le moins du monde. Car la grande faiblesse des conventions internationales reste que nul organisme n’a le pouvoir, au nom des souverainetés nationales, de sanctionner leur non-application. Ce qui peut inciter des pays, au dernier moment, à lâcher des concessions de façade que nul ne pourra vérifier.
Au délà des crises de nerfs –il y en a-, des psychodrames et parfois des larmes, survient le terrible moment de l’arrivée des chefs d’Etat ou de gouvernement pour lesquels le réchauffement climatique se résume en une note de synthése rédigée par un conseiller lue trop rapidement. Un instant redouté par tous les négociateurs car les éminences ont tendance à dire n’importe quoi. Comme Nicolas Sarkozy déclarant le 23 septembre dernier « Le monde va à sa perte si on continue à émettre du carbone qui crée un trou dans la couche d’ozone » ou Alain Juppé m’expliquant il y a deux ans qu’il projetait de « chauffer toute la ville de Bordeaux grâce à l’électricité produite par les panneaux photovoltaïques qu’il allait installer»...
C’est à la lumière de ces incompétences que les chefs d’Etat décident de ce qui sera politiquement acceptable par leurs opinions publiques.

dimanche 6 décembre 2009

Drôle de climat au Danemark: que se passe-t-il à Copenhague

Dimanche 6 décembre

A partir de demain et pendant toute la conférence sur le climat, mes lecteurs habituels pourront me retrouver tous les matins sur Mediapart et sur le blog des rédacteurs de Politis (www.mediapart.fr et www.politis.fr)

Cordialement

jeudi 26 novembre 2009

Seul les jeunes et la société civile peuvent sauver le sommet sur le climat des discours politiques



Jeudi 26 novembre

Dans quelques jours, je serais à Copenhague. Comme je fus à Stockholm en 1972, comme je fus à Rio en 1992, puis à Kyoto et dans beaucoup d’autres assemblées prétendument vertueuses. Plein d’espoirs. Comme des milliers de journalistes donc, je vais guetter le miracle. Comme des milliers d’experts et plus d’une centaine de ministres qui vont feindre le miracle de leur mieux. Car certains sont même sincères. J’y apercevrais également au moins 70 chefs d’Etat ou de gouvernement. Et, avec en vedette américaine le président Obama qui viendra avant tous les autres, auréolé d’un surprenant prix Nobel remis la veille pour nous expliquer que la « maison brûle et que nous regardons ailleurs ». La célèbre phrase de Jacques Chirac en 2002 à Johannesburg, une phrase qui, inventée par Nicolas Hulot voyageant alors dans les bagages présidentiels, formules a « fait pschitt », comme des milliers d’autres Des beaux discours sont à prévoir, des discours à nous tirer des larmes, des discours rédigés par des services de communication qui se saisissent du climat comme du reste pour satisfaire leurs opinions, pour avoir l’air de penser à l’avenir alors qu’ils ne traitent que le présent, voire le passé. Et puis ils passent à autre chose de plus important comme leur réélection, leurs identités nationales ou la sécurité. Puisque le président français n’est pas le seul à nous préparer ce numéro qui sera, comme à Johannesburg salué par les journalistes politiques imperméables à l’écologie. Je les entends déjà, comme en 2002, crier au génie. Et puis quoi, après ?
Je redoute ces discours qui administrent trop souvent la preuve que les politiques ne savent pas, ne peuvent pas raisonner à long terme. Parce que, dans les années 20, 30, 50 ou à la fin du siécle ils ne seront plus présents pour faire face aux dégâts, aux dizaines de millions de réfugiés climatiques, à la submersion des Maldives ou du Bangladesh. Après eux le déluge. Ou les sécheresses. Indifférences au futur communes aux pays du sud, aux pays émergents et aux nations industrialisées. Demain, ils ne savent pas faire et à peine dire.
Ils devraient prendre exemple, ces responsables d’Etat, ces chevaliers de la promesse et des discours, sur les forestiers : de France et du monde entier. Car la noblesse du métier de forestier, depuis le XVII éme siécle, c’est de planter en imaginant les somptueuses forêts qu’ils ne verront jamais, des espaces boisés qu’ils ne pourront jamais admirer. Et pourtant, ils ont planté, pourtant ils continuent à planter. Il suffit d’aller en forêt de Fontainebleau ou dans la forêt de Tronçais, par exemple. Ils ont planté avec foi, avec espoir, avec une conviction admirable. Ils ont planté pour leurs années mortes. Comme je le fais en mon jardin : pour mes enfants, mes petits enfants qui cueilleront un jour les cerises ou les noix que j’imagine.
Alors après des dizaines de conférences sur le thème de l’environnement et du développement, je suis pessimiste. Dans tous les champs de l’écologie et de l’environnement. Qui se souvient, en parcourant le triste bilan de l’Union Internationale pour la Conservation de la nature publié il y a quelques jours, que la Conférence de Rio a adopté une Convention internationale sur la biodiversité ? Elle n’a jamais été aussi menacée et l’Europe avouait récemment son échec cuisant dans ce seul domaine. Qui se souvient que la Conférence de Stockholm a évoqué le réchauffement climatique en suscitant les ricanements ou le scepticisme de la presse et de la plupart des gouvernements ?
Reste, me reste, un espoir : que comme à Stockholm se mobilisent la société civile, les associations qui se sont lancés dans la défense de la planète contre les modifications climatiques. Ils seront dans le « off » et le « in » de Copenhague, comme ils l’étaient à Stockholm et hélas déjà beaucoup moins à Rio. Ils manifesteront toutes inquiétudes confondues le 12 décembre. Pour dire aux experts en train de torturer les virgules et les chiffres qu’il ne faut pas avoir peur d’être radical. Pour dire aux responsables politiques qui arriveront au Danemark à partir du 14 décembre que pour sauver la terre, le temps des discours et des promesses doit s’achever. Se transformer enfin en actes débarrassés des petits calculs et des égoïsmes.
Je veux croire que ces dizaines de milliers d’associatifs vont réussir à peser. L’une de mes raisons d’espérer, c’est que cette fois ils sont majoritairement jeunes, que la relève est en place et mobilisée, qu’ils ont en eux une véritable rage de convaincre. Dans mon association de journalistes spécialisés, celle qui commença avec la Gueule Ouverte, Ecologie Hebdo, le Sauvage, Combat-Nature et bien d’autres à inventer l’information environnementale il y aura 40 ans lundi prochain. Pour l’opinion publique se réveille et pour que ce qu’il est convenu d’appeler la « grande presse » s’empare enfin de ce thème.
Ces jeunes de la relève écolo, ces jeunes qui désertent les partis trop indifférents au sort de la planète et de leurs territoires, ils sont passés avec armes et bagages dans les nouvelles associations, les grandes bien connues mais aussi les petites. C’est avec eux que je vais passer une dizaine de jours. Pour constater que, eux, contrairement aux caciques politiques aux yeux fixés sur la ligne rouge de leurs réélections, ils sont compris que les agitations présidentielles stériles et les jérémiades pitoyables d’un Claude Allègre ne sont plus de mise et qu’il faut agir. Partout. Avant que le ciel ne nous tombe sur la tête. Avant que les François Hollande répètent cette phrase terrible par lui prononcée à la télévision il y a quelques jours : « Copenhague ? Non, je n’irais pas, je n’ai rien à y faire ».
Lui et tous les autres, devraient se souvenir des forestiers de Louis XIV dont les arbres sont toujours debout...

lundi 9 novembre 2009

Et si la chute du mur concélébrée par les prêtres du libéralisme, c'était aussi le triomphe de la société de consommation ?

Lundi 9 novembre

Souvenirs journalistiques d’un voyage sur la route Berlin-Moscou en novembre 1989

Arrivé sur les premiers décombres du mur le 10 novembre 1989, et ayant été témoin, très jeune journaliste de la mise en place des premiers barbelés en août 1961, je m’apprêtais il y a 20 ans, à parler liberté, politique, répressions et idéologie avec la fantastique foule d’Allemands de l’Est et de Trabans fumantes qui fonçaient hors de Berlin par les route et l’autoroute. Les rescapés des trois millions de nouvelles « voitures du peuple » produites par l’Allemagne de l’Est comme autre fois les coccinelles inventés par le régime nazi ont vécu et se vendent aujourd’hui comme des objets de collection et de nostalgie. Et les Allemands de l’Est ne parlent guère plus politique qu’il y a 20 ans. Sauf pour exprimer plus ou moins de la nostalgie. Parce que, probablement, ils se remettent difficilement du choc culturel qu’ils ont vécu entre la société de consommation de l’Ouest et la société de relative pénurie de l’Est. Partant en voiture pour Moscou à travers les pays de l’Est je suis alors à une vingtaine de kilomètres de Berlin où le mur s’effrite depuis la veille.
Les Allemands venus de l’Est dans leurs voitures qui se traînent ou qui attendent le long de l’autoroute, capots levés et mines soucieuses: ils demandent, à commencer par ceux qui ont des Lada, le luxe de l’époque, combien valent les Pontiac ou les Chevrolet. Ils citent des marques que je ne connais même pas, tournent autour de ma R 21, demandent comment fonctionnent le tableau de bord électronique et les portes qui se ferment toutes seules. Aux questions politiques, ils répondent bagnoles, dollars et salaires. Des « policiers du peuple" en patrouille se joignent aux conversations. Le soir des centaines d’Allemands de l’Est s’agglutinaient devant la vitrine du concessionnaire Mercedes le plus proche du mur. Puis, ils achètent des bananes et boivent du coca-cola dont ils chargent leurs sacs ou leurs voitures de retour. A « Check Point Charlie », la seule entrée encore vraiment praticable, sur les tablettes où se déroulait quelques jours plus tôt le processus immuable du contrôle des visas, trônent les mêmes bouteilles de coca et des piles de magazines aux titres et aux pin-up agressives. Le passeport est vaguement examiné et les chiens policiers ont disparu, peut-être partis à la chasse... Sur une Traban qui revient « à la maison » flotte un drapeau américain qui fait rigoler un douanier. Depuis une immense tribune improvisée, les caméras et les photographes guettent la moindre « image symbolique ». Les plus nombreux sont allemands et américains. Ces derniers expliquent souvent avoir l’impression « d’avoir gagné la guerre »...Georges Bush père est au pouvoir depuis 10 mois.
Un seul vrai souci, au moins pour ceux qui ont gardé depuis des lustres des dollars ou de marks de l’Ouest, acheter, se procurer les produits dont, depuis des années, ils regardent discrètement les publicités à la télévision occidentale, lorsqu’ils peuvent ou osent la capter. Comme une rêve inaccessible. Quelques jours de folie, mais aussi de plaisir, à se plonger dans le temple de la consommation. Et j’ai toujours du mal à parler liberté, démocratie ou idéologies comparées.
Direction l’église Saint-Nicolas, le temple luthérien de Leipzig où depuis 1984 se déroule tous les lundis soirs une « prière pour la paix » qui réunit discrètement les contestataires du régime. A tout hasard, explique un jeune pasteur, nous continuons à prier car, dans le fond, rien n’est réglé ». Un jeune barbu, au sein du groupe formé autour de la voiture, complète l’explication : « Nous avons été patients et c’est une bonne raison pour ne pas faire et dire n’importe quoi maintenant. Il ne faut pas confondre avoir envie d’aller à l’Ouest et être comme ceux de l’Ouest. Nous avons notre dignité. Nous ne voulons pas devenir des cousins pauvres recueillis par charité ». La discussion explose, les opinions s’affrontent : Dieu, Lénine, le capitalisme et le socialisme sont appelés à la rescousse. Un prof de math tranche : « que vous le vouliez ou non, nous deviendrons une colonie américaine. Pourquoi pas si cela nous donne le droit de choisir nos responsables avec des élections libres, comme aux USA, moi, dés que ce sera possible, j’y pars ». Protestations. Devant le temple, le jeune pasteur constate amèrement qu’il est minoritaire.
En route pour ce qui est encore la Tchéco-Slovaquie. Avec deux auto-stoppeurs pris à la frontière. Un prof de math d’une quarantaine d’année, Milos et une infirmière, Anna. Quelques kilomètres plus loin, nous embarquons leur fille, Ira. Aux côtés de ses parents plutôt silencieux et inquiets, elle parle sans arrêt, ses vingt ans enthousiastes. Elle délire sur Paris et sur New York au cours de ce qui reste comme route vers Prague : « Nous allons gagner papa, rien ne sera plus jamais comme avant, je vais pouvoir voyager, finir mes études en France ou aux Etats Unis, Prague va devenir une belle ville, tous les gens intelligents vont pouvoir réussi sans adhérer à un parti, à chacun sa chance, maintenant ». Le père ne répond que par monosyllabes et finit par lâcher une longue phrase approuvée d’un hochement de tête par Anna : « Tu y perdras ton âme et nous aussi, un peu plus tard sans doute, il y a au moins autant de pauvres à l’Ouest qu’à l’Est et le paradis n’est ni socialiste ni capitaliste... ». Ira le coupe : « Comme il n’est pas socialiste, il est certainement capitaliste, tu oublies la réussite de nos amis qui ont réussi à partir... ». Anna la coupe gentiment : « Tu oublies tout ceux qui ne nous ont jamais donné de nouvelles ». Ira secoue la tête et montre la foule que nous avons rejoint dans les rues de Prague : « Regardez tous les deux, regardez ces gens, ils sont comme moi, ils rêvent déjà de leur liberté d’entreprendre, le rêve américain n’est pas le cauchemar qu’on nous a présenté ». La foule arborant des T-shirt en anglais, le chic du chic, nous sépare et porte les gens vers la Place Venceslas. où, tard dans la nuit, des milliers de jeunes déposent une bougie devant le lieu où Ian Pallach s’est immolé par le feu vingt ans plus tôt.
En Pologne. Les drapeaux rouges ont mystérieusement disparu. A Varsovie où le Zloty vient d’être une nouvelle fois dévalué, visite au journal de Solidarnosc où le vertige des transformations politiques en cours ne fascine pas tout le monde : « Nous plongeons dans l’inconnu, trop de nos compatriotes rêvent de l’Amérique ». Ils s’engueulent sur l’avenir déjà discernable dans les marchés sauvages où se vendent ce que l’un d’eux appelle les « mirages de l’Ouest ». Un journaliste conclut la conversation : « attention au totalitarisme de la victoire ». Un compagnon de Lech Walesa réplique : « des syndicats libres et fort comme aux USA, cela ne t’intéresse pas ? ». Il s’attire une réponse cinglante : « tu écoutes trop la Voix de l’Amérique, tu crois qu’ils nous soutiennent pour nos beaux yeux ? ».
A Vilnius, en Lituanie encore soviétique, le drapeau jaune du Vatican remplace la faucille et le marteau sur la maison des Pionniers où se tient le Congrès des Jeunesses catholiques, le premier depuis la fin de la seconde guerre mondiale. Virgiliu Tchépaïtis, Secrétaire général de Sajudis, le mouvement indépendantiste créé quelques mois plus tôt explique : « Nous sommes à la veille d’un bouleversement, nous allons rejoindre l’Europe et, déjà tous les émigrés installés aux Etats Unis, annoncent leur retour. Ils nous aideront à construire une économie de concurrence et de libertés, même si nous gardons des liens avec l’URSS ». Tous les congressistes parlent du pape et de Georges Bush, leurs deux idoles. Vitautas Landsbergis, qui a fondé Sajudis et deviendra plus tard président, va de groupes en groupes, commentant à chaque fois ses rêves d’une économie de marché éliminant les pénuries et la pauvreté. A la frontière entre la Pologne et la Biélorussie, la dernière pompe affiche « plus d’essence ». Sauf en dollars et au prix fort. Dans la banlieue de Brest-Litovsk, un fabuleux marché se tient dans la boue et la neige, offrant tous les produits de l’Occident parvenus par la Pologne.
Poursuite du voyage à travers l’URSS à l’entrée de laquelle la police des frontières ne demande qu’une seule « récompense » pour un passage sans formalité : une des barres chocolatés qui traîne sur mon tableau de bord sans prêter une attention particulière, autre que technique, à la voiture.
A Moscou, place Pouchkine, les travaux qui précédent l’ouverture du premier restaurant Mac Donald viennent de commencer. Il ouvrira le 30 janvier 1990 provoquant, je m’en souviens, une queue historique de plus d’un kilomètre...
Vingt ans après la vie moscovite est encore plus américanisée qu’à New York, les pauvres et les très riches y sont encore plus nombreux et la capitale de la Russie compte dix Mac Do et le pays entier prés de 200.
Gorbatchev ? Depuis 20 ans il reste pour la majorité des Russes devant lesquels on prononce son nom, le traître qui tenta de restreindre la vente de la vodka...

jeudi 5 novembre 2009

EDF nous refait le coup de la panne d'hiver. La Gueule ouverte de 1979 dénonçait déja cette pratique!


jeudi 5 NOVEMBRE

Parce que 18 de ses réacteurs sont actuellement hors service pour de nombreux mois et parce que ce nombre risque d’augmenter prochainement, EDF agite de plus en plus bruyamment le spectre d’une pénurie ou d’une grande panne hivernale. Au moment où des millions de Français rentreront chez eux et allumeront (bêtement) leurs radiateurs électriques. EDF rappelle hypocritement que 3 foyers du 10 sont exclusivement chauffés avec de l’électricité. Ce qui autorise trois remarques : d’abord ce chiffre est faux car basé sur le seul habitat collectif et le nombre exact de logements électrifiés est proche d’un foyer sur deux ; ensuite c’est bien EDF qui depuis des années a incité les promoteurs et les installateurs à privilégier le chauffage électrique parce que cela coûtait (et coûte encore) moins cher à l’installation et que cela justifie la nucléarisation de la France ; et enfin si les réacteurs sont à l’arrêt, c’est qu’ils sont pratiquement en bout de course et présentent de plus en plus de dangers pour les populations. Sous la pression d’EDF, les pouvoirs publics ont laissé se construire des pavillons et des immeubles mal isolés bien que chauffés par des radiateurs électriques. Y compris les fameuses maisons Borloo ou Boutin. Conséquence : des millions de familles se ruinent en charges avec des radiateurs électriques qui chauffent aussi bien les maisons et les appartements que l’extérieur.
Mais au delà de cette réalité qui pénalise des millions de familles et devrait contraindre EDF à importer de l’électricité alors qu’elle vante depuis des années le « modèle » énergétique français, il faut se souvenir que Electricité de France nous fait régulièrement le coup de la panne hivernale à venir depuis une trentaine d’années, histoire de convaincre l’opinion publique d’accepter encore plus de nouvelles centrales nucléaires. Les services de communication d’EDF s’activent à abreuver les journalistes de chiffres expliquant les détails de la grande panne à venir, la mise en route des vieilles centrales thermiques polluantes, l’électricité qu’il faudra peut-être (comme chaque année d’ailleurs en hiver) importer parce que nous n’avons pas assez de nucléaire ; bref l’horreur. Que je sache, l’Allemagne qui a programmé il y a des années « l’extinction » progressive de ses réacteurs nucléaires, n’est en aucun cas menacée à terme par une pénurie électrique (c’est elle qui nous en vendrait) alors qu’il y fait, en moyenne, plus froid qu’en France. Mais il est vrai que ce pays ne compte pas d’associations d’écolos rétrogrades s’opposant à la mise en place de parcs d’éoliennes au nom du respect du paysage.
Pour ceux qui douteraient de la manipulation lancée hier par EDF, voici la couverture d’un numéro de la Gueule Ouverte (journal écolo des années de 70 vendu à 100 000 exemplaires) daté de 1979. Déjà EDF nous disait : vous avez le choix entre les bougies et les réacteurs nucléaires.

dimanche 25 octobre 2009

L'heure d'hiver racontée à mon chat

Dimanche 25 octobre

Dimanche matin, Elliot mon chat des Chartreux, si l’on croit les éternels ronchons du changement d’heure, aura été gravement traumatisé d’attendre ses croquettes une heure de plus. Ce qui m’a contraint, comme je ne veux pas vivre avec un greffier, il a trois mois, gravement perturbé, à lui expliquer pourquoi il y a une heure d’hiver et une heure d’été depuis une trentaine d’années et pourquoi, de toutes façons, pour lui plus que pour d’autres, la nuit, tous les chats sont gris. Donc on arrête les montres.
Pas pour faire tourner le lait des vaches attendant angoissées l’arrivée tardive d’un agriculteur déjà fortement déstabilisé et retardé par la mise au point de son dossier de Rmiste pour remplacer l’argent du lait qu’il ne vend plus qu’en perdant l’argent que gagnent les grandes surfaces.
Pas pour affamer de estomacs qui ne supporteraient pas d’attendre les croissants matinaux une heure de plus. Ce qui n’est pas bien grave car ils sont de plus en plus industriels et dégueulasses, aux limites de l’immangeable.
Pas pour désorienter les mésanges et les chardonnerets de mon jardin largement plus traumatisés par le réchauffement climatique.
Pas pour emmerder les canards sauvages qui se prennent pour les enfants du bon dieu crucifiés depuis que les chasseurs les réveillent à l’aube en tirant dans tous les coins. Ils ont failli croire, l’espace d’une heure durant, que la chasse venait d’être fermée par un Borloo ayant fait honneur une heure de plus à son apéritif vespéral.
Pas pour perturber la lune qui s’est couchée toute seule après avoir regardé l’horloge des églises, ne sachant pas encore qu’il ne faut jamais leur faire confiance.
Pas pour plomber les finances des municipalités qui s’obstinent, aux dépends des insectes et des rapaces nocturnes, à éclairer au coeur de la nuit les rues où il n’y a plus personne pour lire sous les réverbères.
Pas pour embêter les parents qui racontent des sanglots dans la voix que leurs enfants vont être déstabilisés pendant des jours et des jours simplement parce qu’ils leurs communiquent leur angoisse sur ce que des scientifiques en mal de notoriété facile appellent la chrono-rupture.
Pas pour donner une chance à la France d’augmenter sa natalité. Encore que...
Pas pour faire de la peine aux vaches insomniaques qui vont désespérément attendre le passage d’un train de nuit arrêté dans une gare.
Pas pour que l’émission de Ruquier dure plus longtemps car il ne faut pas abuser de la patience des Français ; notamment en invitant Madame Balkany, la VRP de Levallois commise à la défense de monsieur fils.
Pas non plus, donc et enfin, pour donner une heure de plus à Jean Sarkozy pour réviser ses cours de droit. Puisque pour le théâtre, il est parfaitement au point.
Juste pour faire râler la France des conservateurs qui se sont assoupis dans leur conformisme juste avant la guerre. Au point que le Sénat, qui les représente à merveille, avait estimé nécessaire et urgent de consacrer un rapport de 40 pages à ce grave sujet en 1996. Depuis, ils se sont rendormis après avoir gravement examiné une question quasi transcendantale : « Faut-il conserver l’heure d’hiver pendant l’été ? ». Relisez, c’est profond.
Juste pour favoriser la prise de parole annuelle de Madame Eléonore Gabarin, présidente et membre quasiment unique depuis 20 ans de la folklorique Association française contre l’heure d’été double, encore moins connue sous le nom d’ACHED.
Mais aussi parce que l’on peut bien changer de temps en temps un rythme quotidien qui n’a de toute façon pas grand chose à voir avec le rythme solaire dont les nostalgiques d’on ont ne sait trop quoi nous rebattent les oreilles.
Mais pour économiser ne serait-ce que quelques dizaines de millions de tonnes de pétrole car les ricaneurs grincheux, lorsqu’ils évoquent le contenu d’un seul tanker épargné en France, oublient que les 27 pays de l’Europe en font autant. Imités par d’autres grands pays du monde qui ont commencé avant nous. Ce qui tendrait à prouver que l’idée n’est pas aussi ridicule que le prétendent les atrabilaires jamais disposés à accepter un minuscule changement de leurs habitudes. Surtout lorsque l’on sait que le stock de pétrole disponible n’est pas inépuisable.
Et aussi, avouons le, parce que je suis fasciné de voir mon ordinateur changer l’heure tout seul pendant que je tourne les aiguilles d’une vieille pendule.
Mais revenons à l’essentiel : si, dimanche matin, Elliot ne s’est pas réveillé, c’est parce qu’il n’a pas entendu Nicolas Demorand qui, d’ordinaire lui sert (vraiment) de réveille-matin et l’oriente du lit où il fait la danse du ventre vers sa gamelle. Ce jeune chaton qui a une horloge dans le ventre mais pas de montre à la patte, ne sait pas encore que Demorand n’a pas encore lancé une OPA sur la matinale dominicale. Il me reste à lui conseiller la patience.
Et pour les caresses, il n’y a pas d’heure...

samedi 10 octobre 2009

Le film "Syndrome du Titanic" de Nicolas Hulot: vaut le détour et fait oublier la production ringarde d'Arthus-Bertrand

Samedi 10 octobre

Au début de son film, Nicolas Hulot explique « Je ne suis pas né écolo, je le suis devenu ». Une phrase qui efface les quelques maladresses du texte qui suit, texte qui s’appuie sur des images saisissantes et parfois terrifiantes. Comme celles de Lagos, la capitale du Nigeria, où une partie de la ville vit dans un mélange d’ordures et de voitures. Un télescopage de la plus extrême pauvreté et de la copie du modèle occidental. Le même modèle pour tous, hélas, appuie le commentaire en expliquant qu’il existe pourtant des voies différentes pour atteindre le bien être. A condition que l’éducation soit privilégiée. Avec cette interrogation constamment répétée et surtout illustrée, de Hong-Kong à Detroit en passant par Paris ou Los Angeles : « où est le progrès quand tout est marchandise ?». Comme le montre une séquence saisissante, entre tourisme et consommation, filmée en Namibie.
Le film n’apporte pas la réponse. Peut-être parce que l’auteur explique presque dés le début : « Je ne suis pas optimiste, je maintiens un espoir ». Il est vrai que les images sont souvent désespérantes. On est loin de la ringardise esthétisante de Yann Arthus-Bertrand qui ne regarde jamais les hommes ; on est loin aussi, même si elle fut plus efficace, de la lourde pédagogie du film d’Al Gore conjuguant jusqu’à la nausée le thème « moi et le climat ». Yann Arthus-Bertrand, dans un mode encore plus mineur, fait de même en contemplant son nombril et celui de la planète.
Pas étonnant que l’escrologiste du consortium Pinault ait reçu tant de louanges pour sa jolie bluette et que beaucoup de confrères fassent la moue sur le film de Hulot. Le premier présente le monde comme nous voulons absolument encore croire qu’il est, comme si les beautés des paysages « vues du ciel » pouvaient masquer les horreurs des destructions, des pénuries, des gaspillages et des pauvretés. Le second, ce qui peut paraître désespérant et sans analyse toujours directement perceptible, nous montre la terre telle qu’elle est. Ce qui devrait nous inciter à l’action et à la réaction plutôt qu’à nous barricader derrière des murs longuement décrits : celui qui isole les Palestiniens comme celui qui sépare le Mexique des Etats Unis.
Insister sur la misère du monde plutôt que ce qui lui reste de beauté, a pour avantage, d’autant plus que c’est clairement expliqué, de rappeler, de marteler que les combat pour l’écologie ne peuvent pas être séparée des combats contre les inégalités ; et que pour préserver, il faut partager. Résultat : même quand on sait tout cela, et encore plus quand on ne le sait pas ou que l’on veut l’oublier ou encore qu’on ne veut pas le savoir, on encaisse des coups de poings salutaires. Rien à voir avec les caresses dans le sens du poil prodiguées par Yann Arthus-Bertrand : le monde il est beau il est gentil et si vous faites un petit effort, on va s’en tirer.
Rien de tel dans le Syndrome du Titanic. Hulot, même si le propos est parfois trop elliptique, nous demande d’arrêter la musique et de regarder, de réfléchir. Avec cet avertissement tiré des images : « si nous ne changeons pas, la nature va procéder elle même à des ajustements et se seront les plus pauvres, au nord comme au sud, qui en souffriront les premiers ».
Avec une conclusion sur notre modèle qui mérite réflexion : « Peut-être avons nous trop bien réussi ».
Clairement, Nicolas Hulot n’est pas seulement devenu écolo, il est devenu politique et on se demande bien ce que lui répondent Jean-Louis Borloo ou Nicolas Sarkozy quand il leur raconte sa vision du monde...

lundi 21 septembre 2009

Les mensonges de la France rétrograde qui se bat contre les éoliennes

Lundi 21 SEPTEMBRE



Pour préparer leur prochaine "manifestation nationale", les associations de conservateurs du paysage n’hésitent pas à mentir et ils diffusent depuis quelques jours une photo-montage censée représenter le Mont Saint Michel quand il sera (soi disant) équipé d’éoliennes. Ce qui est évidemment faux même si ce "monument" n’est guère qu’un pompe à fric pour laquelle l’Etat et les collectivités locales sont en train de dépenser plus de 200 millions d’euros pour remettre de l’eau autour. Tout cela sous couvert d’écologie.

On attend avec impatience la diffusion de photos montrant le paysage détruit par les urbanisations commerciales et les pylônes d’EDF. Ou les photos des centrales nucléaires qui ne menacent pas que le paysage. Mais là, pas question, toutes ces associations rétrogrades qui recrutent essentiellement chez ceux qui veulent préserver (? ??) leurs châteaux ou leurs résidences secondaires, ont de trop bonnes relations avec AREVA et les milieux pro-nucléaires. Lesquels les aident à lutter contre l’extension des énergies renouvelables en diffusant de fausses informations sur le bruit des éoliennes et le danger qu’elles font courir aux oiseaux.

Il en est même qui assurent qu’elles font tourner le lait des vaches...

vendredi 18 septembre 2009

In vino veritas ? De moins en moins et surtout pas dans les foires aux vins. Petite leçon de vigne et de pinards buvables..

Vendredi 18 Septembre

Un jour viendra sans doute où notre oracle élyséen buveur d’eau organisera la restriction au vin que par ukase de la loi il faudra boire avec encore plus de modération qu’aujourd’hui. Ainsi se profile la société hygiéniste et puritaine qui prétend de plus en plus organiser notre vie tout en laissant les industriels et la grande distribution proposer aux consommateurs –quand ils ont le choix- des aliments mortifères et grossisseurs, chargés d’huiles exotiques et hydrogénés, de graisses, de sucres, de féculents, d’imitations de vitamines et de conservateurs et émulsifiants divers : regardez bien une boite de cassoulet ou de petits salés aux lentilles et vous constaterez que la proportion de viandes mal identifiées oscille entre 18 et 22 % .
En attendant que s’instaure sournoisement et progressivement une nouvelle prohibition, les grandes surfaces, pour accompagner les merdes et autres plats élaborés aux dépends de la santé et du budget (1) du consommateur, voici que s’annonce l’affaire annuelle du siécle : les foires au vin. Estomacs fragiles s’abstenir ou bien choisir soigneusement: ces soldes du pinard constituent une occasion unique, dans 80 % des bouteilles proposées, de fourguer du déboucheur d’évier aux couleurs chatoyantes et aux étiquettes aussi équivoques que rutilantes. Opération qui, dans le fond, représente le meilleur moyen de parvenir à dégoûter les Français du vin s’ils continuent à les fréquenter. Le voilà le grand complot. Avant que le bouleversement climatique ne transforme les petits clairets en vinasses lourdement chargées et ne mette à bas l’édifice patiemment échafaudé pour nous gruger, des AOC qui se sont, comme à Canaan, multipliés comme des petits pains uniquement pour faire marcher le commerce.
Toutes les vignes ne pourront pas grimper sur des collines pour conserver leurs (souvent prétendues) caractéristiques. Avertissement donc à ceux qui hurlent contre la taxe carbone : vous allez bientôt pleurer ce qui reste de buvable dans vos grands crus et autres vins de pays. Dommage car la vigne, notamment du Noa interdit depuis 1930, que je soigne en mon jardin et dont les raisins sont murs depuis huit jours raconte une bien belle et longue histoire. Encore plus passionnante que celle du tabac, du cannabis, des liqueurs de gentiane, de l’absinthe ou du café qui finiront bien par être bannis de notre société en route vers le puritanisme et le règne des peine-à-jouir.
Des vestiges archéologiques datant de 6000 ans et de Babylone mentionnent déjà clairement la vigne et le vin. Alexandre y goûta des breuvages sublimes avant d’y mourir, probablement du paludisme parce qu’il avait découvert ces nectars trop tard. Avant d’être, bien plus tard, peuplée par des Chiites qui ont fini par brûler ou défoncer les derniers magasins tenus par les derniers chrétiens de Bassora vendant un peu d’alcool et de vins, la Mésopotamie abritait les Arabes des Marais glorifiant le jus de la vigne fermenté avant que ne surgisse les diktats du Prophète. D’où sans doute cette réputation de la région d’avoir été le Paradis terrestre. Et j’ai connu un Afghanistan paradis de la vigne où ceux qui sont devenus des Taliban ou furent forcés de les suivre, ne répugnaient pas à confectionner des breuvages forts qui ne sentaient pas que la pomme. Mais il est vrai qu’en ce temps là, à Kaboul, les jolies afghanes se promenaient à visages découverts dans les rues.
D’autre part, mais on entre là dans la légende biblique, Noé aurait pas mal forcé sur le breuvage fermenté issu de sa vigne une fois débarqué de son arche et le déluge calmé. Après tant d’émotion on le comprend. Le mythe rejoint ainsi la réalité pré-historique puisque le mont Ararat sur lequel s’échoua l’Arche est à portée d’ivrogne du cœur des montagnes du Caucase où les archéologues ont identifié l’apparition d’une ou plusieurs variétés de vignes cultivées il y a 7000 ans ; époque à la laquelle les hommes, comme ceux de Mésopotamie donc, sur les bords du Tigre et de l’Euphrate, ne tiraient pas de ces plantations que du jus de raisin. Ce qui signifie clairement que les joies et les errements bachiques (avec modération, soyons politiquement correct…) des hommes et des femmes sont aussi vieux que l’agriculture. Il n’est pas surprenant que les premières traces de vignes et surtout de jarres destinées à en recueillir le produit aient donc été relevées en Géorgie, le pays où la vendange reste une institution et une fête nationales ; le pays aussi où, à la fin des années 50 du XIX éme siècle, Alexandre Dumas en voyage se vit accorder un diplôme de « très grand buveur » par le prince Tchavtchavadzé. Hommage rendu par des Géorgiens dont la grande performance était et reste de lamper leurs vins dans des hanaps de deux ou trois litres. Pour moi, ce pays est à jamais celui de la vigne et du vin. 2500 ans avant notre ère, les ancêtres des Géorgiens ayant fait école, des bas-reliefs égyptiens ont fixé pour la postérité les scènes de vendanges et de foulage du raisin. En Arménie, là ou, comme en Géorgie, les bricoleurs industriels du vin n’ont pas encore sévi partout, beaucoup de vins restent divins. Et je connais un Français, à une centaine de kilomètres de Tbilissi, qui veille avec amour et respect sur d’énormes jarres enterrées où mûrissent ses nectars qui ne doivent rien à la chimie qui ravage la production française. Dés cette époque, et toujours en Mésopotamie, le raisin qui se conservait mal, se faisait sécher au soleil. L’invention du raisin sec, produit à la portée du jardinier amateur, comme mes piments de mon jardin qui achèvent leur dessiccation, est à la fois accidentelle et contemporaine de celle du vin.
Pour ce qui concerne la France, au plus exactement la Gaule celtique, c’est dans les environs de Marseille, qui se nommait alors Massilia, quelques 600 avant notre ère, que les vignes et le raisin s’installèrent sur notre territoire. En quelques dizaines d’années, par la grâce ou la faute des Phocéens qui avait apporté cette culture et ces habitudes de Grèce, trop de pauvres piquettes très chargées en tanin, l’analyse des amphores l’a prouvé, commencèrent à concurrencer la cervoise des Gaulois qui ne laissèrent pas leur part aux chiens des Romains. Les vignes se répandirent si rapidement sous la domination de ces Romains qui les trimballaient au hasard de leurs conquêtes, qu’un siècle avant Jésus Christ, précurseur de bien des politiques agricoles, l’empereur Domitien ordonna l’arrachage de la moitié du vignoble méditerranéen français. Il faisait une concurrence déloyale à la production romaine de vin. Bien plus tard dans les années 30 du XVIII éme siècle, Louis XV en fera autant pour juguler la production de vins médiocres qui étaient de véritables « pousse-au-crime ». Sous les Romains comme sous les Louis XV et XVI, ce genre d’ukase entraîna l’augmentation des cultures pour le seul raisin, le frais et celui que l’on séchait au soleil. Des Romains aux Gaulois, la vigne gagna le nord, passant par le Bordelais et la Bourgogne. La progression fut telle qu’au Moyen Age, et pour longtemps, Paris et la région parisienne devinrent le plus grand vignoble de France.
La preuve par le passé, surtout en ces temps de réchauffement climatique, que s’offrir une ou plusieurs treilles dans un jardin de la région parisienne, même en ses départements septentrionaux, ne relève ni de la lubie ni de l’utopie. Surtout au temps de ce réchauffement climatique qui, depuis des années, avance la date de mûrissement de mes raisins divers et de toutes les vendanges. Il faut aussi se souvenir qu’une vigne s’installe pour des dizaines d’années, voire des siècles. Rien de plus résistant que les vieilles treilles : défrichant un espace oublié de mon jardin, j’en ai exhumé il y a quelques années, des rejets de ceps plantés il y a au moins 70 ans. Elles survivaient enfouies dans un amas de pierres et de ronces : quelques rameaux gros comme le poing relevés et palissés, les racines adventices qui s’étaient formées au contact du sol, coupées, elles ont donné au bout de quelques années. Notamment du Noa, cépage d’origine américaine interdit en 1930 car réputé rendre fou, comme l’absinthe. Mais cette variété et quelques autres restent insensibles à toutes les maladies ; de quoi désespérer les industriels de la chimie agricole. De quoi expliquer que beaucoup de vins bios, y compris dans mon Giennois, s’appuient sur ces variétés anciennes. Beaucoup de jardins et de terrains cachent ainsi des vignes oubliées dont on peut faire, maintenant et facilement, des boutures qui permettent de récupérer une vieille variété. Car il fut un temps pas si lointain ou presque toutes les maisons s’offraient le plaisir automnal du raisin de la treille. Il en reste encore dans Paris, dans le 20 éme et le 13 éme notamment.
Pour faire du vin, il ne faut pas (trop) rêver : il en faut quand même beaucoup (de raisin) et surtout c’est un art difficile à maîtriser si on ne veut pas imposer une redoutable piquette maison à tous les amis trop polis en visite. Par contre, avec un mini-pressoir, le jus de raisin immédiatement mis au frais pour qu’il ne fermente pas, est aussi le plaisir des dieux.
En attendant cette chance, plutôt que d’alimenter le cash-flow des grandes surfaces où les piquettes et les escroqueries coulent à flots, il faut chercher les petits producteurs et les pionniers du vin bio et leur rester fidèles. Même si, pour ces derniers, un effort reste à faire au niveau de la vinification. Mais il y a de l’espoir car le réchauffement climatique qui sonnera le glas des piquettes et vins industriels brevetés par des AOC souvent aussi mensongères que commerciales, sera leur meilleur allié.

(1) Un kilo de carottes en vrac, au marché ou en grande surface : 0,90 euros. Les mêmes carottes râpés en barquette assaisonnée de 8 (huit) grammes de vinaigrette à l’eau : entre 4 et 6 euros le kilo. Mêmes différentiels pour les pommes de terre en barquette, les radis, les herbes aromatiques venues d’Israël ou d’Argentine et les salades sous vide. Courez vérifier cette folie, regardez les étiquettes pour vérifier et que l’on me dise quelle est la suractivité d’un individu ou d’un couple qui ne laisse pas quelques minutes pour râper des carottes, éplucher des patates ou cuire une oeuf dur (oui, j’en ai vu) ou laver une salade. Lavage qui de toute façon ne chassera pas les nitrates d’une chose poussée sur lit de plastique.

vendredi 11 septembre 2009

Taxe carbone: la schizophrénie française



Ce dessin de Plantu à la "une" du Monde hier, me semble parfaitement résumer l'attitude de la droite, de la gauche et de la majorité des Français à propos des efforts à faire pour préserver le climat. Il y a loin des bons sentiments exprimés dans les sondages et les discours à la réalité. Et les petites mesures proposées par le petit président sont à sa juste mesure: l'essence et le fioul sont présentés comme responsable de tous les maux alors que la société de gaspillage et du jetable n'est absolument pas remise en cause.

vendredi 4 septembre 2009

Taxe carbone "carbonisée", deuxiéme épisode de la démagogie des partis

Vendredi 4 septembre



Tandis que les vendanges se déroulent déjà avec trois ou quatre semaines d’avance par rapport à leurs dates d’il y a cinquante ans, tandis que les vignerons alsaciens se demandent ce qu’ils vont faire des 2,5° en trop de leurs vins, tandis que tous les responsables d’AOC s’interrogent sur quelques hauteurs ils vont devoir déménager leurs ceps, tandis que les habitants de la Camargue se demandent comment ils vont vivre avec de l’eau plus salée et sans les flamants roses, tandis que des falaises s’effritent sous les coups de boutoirs de la mer, tandis que les évènements météos aberrant se multiplient, tandis que des sols se détériorent, tandis que les rivières se dessèchent et perdent irrémédiablement leur biodiversité, tandis que les nappes phréatiques s’épuisent, tandis que des millions d’arbres meurent sur le territoire français, tandis que de nouveaux insectes envahissent villes et campagnes, tandis que des oiseaux disparaissent, tandis que donc, la liste n’étant pas limitative, la température moyenne monte, les démagogues du PC, du PS et de toutes gauches unis avec ferveur avec les démagogues populistes de toutes les droites et du Medef flinguent la taxe carbone. Comme à une ouverture de la chasse, ça tire dans tous les coins et sur n’importe quoi. Tandis que les banquises fondent aux pôles, que les cyclones et typhons se multiplient, que des millions de réfugiés climatiques se mettent en route, tandis que l’Afrique et l’Asie se désertifient, tandis que des cultures essentielles y disparaissent, et donc tandis que la planète s’échauffe ou se dérègle, monsieur François Fillon balance son aumône misérable de 14 euro la tonne à la face des nouveaux malheurs du monde.
Voici donc venu le temps que je redoutais il y a quelques jours : en baptisant « impôt » l’incitation à changer nos vies et nos consommations, le monde politique tourne le dos à l’avenir de la planète et à notre avenir. Avec au fond de lui-même, au PS, au PC et comme à l’UMP et au MEDEF le sentiment que « les écologistes nous emmerdent », qu’il s’agit d’une simple mode et que tout finira par s’arranger. Le discours ou la pensée cachée qui ont toujours accompagné les avertissements de ceux qui, lorsque ce monde politique les traite d’utopistes, répliquent depuis des lustres, que les utopistes sont ceux qui croient que nos gaspillages et nos destructions vont pouvoir durer éternellement sans que nous prenions une grande baffe dans la gueule.
Les premiers gifles sont déjà anciennes et elles ont frappé et frapperont avec la même efficacité les riches et les pauvres (oublions les périphrases genre « démunis » et « classes populaires »). Les pollutions de l’eau et de l’air ne font pas de différence entre les niveaux de vie et le climat est le même pour tous. Encore que...vivre par 33° dans un appartement de Saint-Denis n’offre pas la même existence qu’avec la climatisation dans une villa de Neuilly. Etc. Il est d’ores et déjà certain qu’avec le réchauffement climatique nous allons en prendre plein la gueule et qu’il est déjà bien tard pour agir. Alors il faut cesser de finasser et de croire au Père Noël de la canicule et des tempêtes.
Avec ses 14 euros jetés avec mépris à la face de Gaïa, avec ses offres de compensations aussi ridicules que fumeuses, le premier ministre se met la France hors-jeu pour la conférence de Copenhague de décembre sur le climat. Il est en bonne compagnie avec le Medef qui veut à la fois le beurre, l’argent du beurre et la cuisse de la crémière: la suppression de la taxe professionnelle, pas de taxe carbone et la sempiternelle « réduction des charges ». Avec leurs criailleries semblables sur le montant de la taxe, sur le coup porté « aux classes populaires », sur « l’injustice du même impôt », les gauches entonnent le même air en changeant simplement les paroles, manifestant le même mépris pour la planète, la même réflexion à court terme (six mois...) et le même manque de préoccupation pour l’électorat « démuni » qu’ils voudraient récupérer.
Alors, il faut être clair. Si elle voit le jour sous la forme prévue...
D’abord toute taxe carbone touchera beaucoup plus les riches que les pauvres puisque ces derniers achètent et consomment moins. En commençant par le clim’ pour la villa de Neuilly.
Ensuite, à ma connaissance l’électricité est une énergie (même secondaire). Alors il est scandaleux qu’elle échappe à la taxe carbonne. Sauf s’il s’agit de faire plaisir à EDF. Cela évitera peut-être que les fameuses maisons-Boutin-Borloo bon marché soient chauffées...à l’électricité. Cela évitera peut-être que le BTP augmente ses bénéfices en n’installant que des chauffages électriques dans les nouveaux immeubles. Cela évitera peut-être que la France soit sous-developpée en chauffage et électricité solaire tout comme en éoliennes. Et, par pitié, que l’on m’épargne le numéro « destruction des paysages ».
Ensuite encore, ce n’est peut-être pas politiquement correct de l’affirmer et même de le réclamer : oui, la taxe carbone qui est une incitation à acheter autre chose, à vivre progressivement autrement doit toucher tout le monde. Sans exception. Sans cela, elle ne servira à rien. De quelle utilité sera l’incitation, par exemple, à acheter un produit trop emballé si le mauvais geste est remboursé ? Il faut changer de société donc, que les politiques arrêtent de se dissimuler derrières « les pauvres » pour ne rien faire et, donc, protéger les riches. Si la classe politique se préoccupait de la partie la plus démunie de la population il n’y aurait pas 8 millions de gens en dessous du minimum vital en France. Alors qu’on arrête de nous emmerder avec cette fausse compassion.
Et enfin, je le répète : le Medef peut bien couiner, mais c’est au niveau des entreprises, au niveau des importations, des fabrications et de la distribution que la taxe carbone doit être instaurée, que l’incitation à ne plus gaspiller ni l’énergie ni les matières premières doit fonctionner ; et à 32 euros la tonne. Avec, je le répète également, interdiction légale de la répercuter sur les consommateurs. Tout le reste n’est que de l’agitation. Même le PS n’ose pas se tourner vers les industriels qui organisent et vendent le gaspillage et ceux qui vont fêter l’humanité dans quelques jours sont soit sourds, soit aveugles, soi aphones.
Le lecteur l’aura compris, je suis encore plus en colère que la semaine dernière et submergé par la démagogie climatique.

jeudi 3 septembre 2009

Climat: les partis "carbonisent" la taxe et Fillon lance une aumône à la face de la terre

Jeudi 3 septembre

En quelques déclarations aussi fumeuses que péremptoires, toujours à la pointe de l’écologie démagogique à reculons, les socialistes ont tordu cyniquement ou bêtement (au choix) le cou à la « taxe carbone » plus connue sous le nom de « contribution climat ». Du pain béni pour la majorité qui n’en demandait même pas tant et se réjouit secrètement que cette tentative de freiner nos gaspillages soit baptisé « impôt » par la gauche. Une aubaine qui met de côté toute réflexion intelligente et raisonnable sur nos modes de vie et sur les modifications climatiques. Ni les ministres de l’UMP ni encore moins, si c’est possible, les parlementaires de droite ne sont disposés à tolérer que les industriels, les producteurs d’énergie et les réseaux de distribution soient contraints par la loi a faire attention à leurs méthodes de production et de distribution. Comme les socialistes, pour écarter cette menace, ils laissent entendre que la « taxe carbone », sera en fait un impôt nouveau qui frappera « les couches populaires ». Voire qu’il remplacera la taxe professionnelle. Impôt ! Le gros mot qui fâche est lâché ; glissement sémantico-politique en forme d’épouvantail qui permettra aux faux vertueux de gauche et de droite de continuer à supporter ou à organiser les gaspillages. En feignant de croire que cette incitation à consommer différemment ne concernera que les gens les moins favorisés et que, mieux, elle les frappera en premier ; et durement. Les uns et les autres nous expliquent que le système (lequel ?) au pire organisera une compensation, ce qui promet la construction d’une « usine à gaz » de plus. « Construction » qui ne profitera qu’à ceux qui peuvent se payer le luxe de gaspiller le climat de tous.
Les socialistes et l’UMP entonnent la sérénade hypocrite des salariés qui « habitent de plus en plus loin de leurs lieux de travail ». Les premiers oublient qu’ils ont ouvert la voie aux réductions des transports ferroviaires et les seconds que toute la politique des infrastructures de chemin de fer, depuis 2002, organise la disparition des réseaux secondaires au profit des lignes à grande vitesse qui ne fonctionnent toute l’année que pour une minorité de Français. Et l’UMP oublie déjà que les nouvelles règles de chômage imposent aux demandeurs d’emploi d’accepter des boulots loin de leurs domiciles sous peine de voire leur indemnité réduites ou supprimées. Le PS et l’UMP ne sont pas prés de s’écologiser...
Depuis quelques années, s’ils veulent des trains, les Conseils généraux et les Conseils régionaux sont priés de payer. Et donc de faire payer le maintient très relatif d’un service public aux contribuables. Ce qui n’empêche pas une SNCF à la recherche de rentabilité, ni d’augmenter ses prix, ni de supprimer des trains malgré les oppositions des usagers. Lesquels, de manifestation en blocage de voies et manifestations ne parviennent qu’à reculer les échéances qui les précipitent vers leurs voitures. Avec en prime l’abandon du rail pour le fret, le ferroutage ne restant qu’un slogan vide.
De plus, faire croire que seule l’utilisation de l’essence, de fioul et du gaz (et même pas l’électricité !) sont les seules causes des menaces climatiques est, pour reprendre le mot de Daniel Cohn-Bendit, une affirmation « stupide ». Que penser de nos importations et donc de notre consommation, en ce moment, vus dans une grande surface ce lundi, de salades des Pays Bas, de tomates grecques, de pommes en provenance de Chine, de poires du Portugal, de poivrons et de pêches du sud de l’Espagne ou de kiwi d’Afrique du sud ? Que penser encore du lait de brebis du Larzac qui part en Grèce en camions réfrigérés pour nous revenir sous forme de Feta ? Que penser enfin, les exemples sont légion, des pommes de terre qui partent vers le Maroc pour être épluchées avant de nous revenir pour faire des frites ou des chips ? Ou des « voitures vertes » rapatriés des confins de l’Europe par nos constructeurs nationaux ?
C’est clair : quelques mois avant la conférence sur le climat de Copenhague, une incitation écologique et financière forte est nécessaire. Car les modifications climatiques, quelles que soient leurs manifestations toucheront chacun d’entre nous, au Nord comme au Sud. Les conséquences concerneront aussi bien les plus démunis que les autres. Avec même, une « préférence » pour les premiers.
Et ce n’est pas l’aumône de 14 euros la tonne jetée de façon méprisante à la face de Gaïa qui contribuera à calmer la fièvre et les tourments du climat.
Mais il est clair aussi que la pénalisation de toutes les activités gaspillant l’énergie et les matières premières doit en premier lieu être imposée aux fabricants et distributeurs : avec interdiction contrôlée de répercuter les conséquences de leurs conduites écologiquement stupides et dangereuses sur leurs prix de vente. Les consommateurs ne doivent participer que marginalement à ces efforts nécessaires : il n’ont jamais demandé la mondialisation des objets et produits qu’ils consomment !
Sans ces obligations aux seules producteurs et distributeurs, la contribution écologique va purement et simplement passer à la trappe sous couvert de défense des plus démunis.

ps Aux dernières nouvelles, le gauche et la droite ont gagné en agitant l'épouvantail impot puisque selon le dernier sondage de la Sofres, les deux tiers des Français, les mêmes qui s'affirment prêts à "payer pour protéger l'environnement", se déclarent opposés à toute contribution climat.

vendredi 28 août 2009

Que faire de Claude Allègre: au musée, au pôle nord ou dans une réserve naturelle pour mammouth ?

VENDREDI 28 AOUT

Que faire de Claude Allègre ? La question n’est pas nouvelle mais elle prend une certaine acuité avec la polémique (re)lancée il y a quelques jours par ce dinosaure dans Le Parisien, à propos du climat et de la taxe carbone. Trop c’est trop ! Le bouffon de l’écologie a encore frappé et va polluer la discussion déjà difficile sur la mise au point de la contribution énergétique de l’automne. Comme Mediapart l’a démontré à plusieurs reprises, la compétence scientifique d’Allègre (l’association de ces deux termes représente déjà en soi une incongruité) est largement sujet à caution depuis que, dans une autre vie, ce spécialiste de la tectonique des plaques a en vain cherché de l’or dans les mines péruviennes pour le compte (déficitaire) du BRGM, le Bureau de Recherche Géologiques et Minières, ou de chercher à ridiculiser Haroun Tazieff à la Martinique en annonçant une éruption volcanique qui ne se produisit pas. Avant de le virer. L’objectif n’est pas d’infliger au lecteur la liste édifiante et terrifiante des erreurs et provocations commises par ce mammouth de la médiatisation ; en poursuivant par exemple, par sa négation des dangers de l’amiante dans les années 70 et son soutien aux industriels qui la produisaient. Non, la question est clairement autre : comment se débarrasser utilement (je suis pour le recyclage) de cet escroc scientifique qui utilise ce qui lui reste de crédit pour raconter partout n’importe quoi. En profitant d’une réputation dont l’usure devrait un jour l’amener à présenter un jeu télévisé sur TF 1 pour garder son statut de vedette. Plusieurs solutions sont envisageables.
Il devrait être possible de l’empailler pour l’installer en bonne place à l’entrée de la Galerie de l’Evolution du Muséum National d’Histoire Naturelle car il représente quand même une superbe illustration de la faculté de retour en arrière conservée par l’espèce humaine ; et la preuve au fond que Darwin était parfois trop optimiste en comptant sur les bienfaits de l’évolution. Depuis des années, Allègre a enclenché la marche arrière en se déclarant sans aucune nuance partisan du nucléaire, en niant les retombées de Tchernobyl et en encensant sans preuves ni compétence la prolifération des OGM. Bref il illustre parfaitement une célèbre réplique attribuée à Audiart : « les cons ça ose tout, c’est même à cela qu’on les reconnaît ». Je sais, ça frise l’injure, mais la mesure est comble et Allègre est une injure permanente à la science et au bon sens.
On pourrait aussi envisager la création d’une réserve naturelle dans un arrondissement de Paris où il pourrait être considéré, avec Bernard-Henri Lévy, Frédéric Lefèbvre, Philippe de Villiers, Jean-Marie Le Pen et quelques autres, comme représentatif d’une espèce en voie de disparition : les animaux capables de s’enfler d’eux mêmes. La grenouille de la Fontaine, par exemple. Le phénomène est suffisamment curieux pour être préservé et pour qu’il soit permis au peuple d’observer le mécanisme de prés. Il est fascinant.
La possibilité de le relâcher sous le soleil de l’Andalousie ou du Burkina Fasso pour mesurer la vitesse de refroidissement du climat doit également être envisagée. Ce qui reviendrait à transformer ce baromètre déréglé de la science en simple thermomètre équipé d’une balise émettrice relié à l’Académie des Sciences où cette phrase prononcée en 1999 doit sans doute être gravée dans le marbre : « L’intégration, c’est l’exact inverse de l’exclusion ». A la même époque il expliqua « l’anglais n’est pas une langue étrangère ».
Le gouvernement pourrait également le charger d’une vaste étude visant à nous prouver que la terre est plate et ne tourne pas autour du soleil comme l’explique la Princesse de Clèves: de quoi faire parler dans les gazettes et le réhabiliter dans les colonnes de l’Express d’où il a été exclu. Plus c’est gros, plus ça fait des titres prolongeant artificiellement la mousse médiatique. Avec un peu de chance il va nous démonter les réussites du darwinisme en prenant pour exemple Nicolas Sarkozy.
Il pourrait également remplacer avantageusement les frères Bogdanoff à la télévision. Pour peu qu’on lui trouve une combinaison spatiale à sa taille : après tout le genre comique volontaire n’a jamais été essayé par Claude Allègre qui se contente depuis quelques années du comique de répétition. Mais les meilleurs gags finissent par s’user.
La vente de l’escrologiste national à la Russie constitue une autre solution intéressante, intellectuellement et financièrement, puisque ce pays est à fois frappé par une forte dépopulation, par une négation du réchauffement climatique qui, comme l’a un jour dit Allègre, va permettre de faire pousser du blé en Sibérie, et par une progression exponentielle de l’irrationnel. Beaucoup de Russes croient toujours que le vin blanc de Moldavie et la vodka constituent une protection efficace contre les radiations nucléaires et devraient donc accueillir un tel farceur scientifique avec enthousiasme. On pourrait aussi le louer à W. Bush pour égayer sa retraite. Un recyclage durable. Le recyclage raté est évidemment celui de l’entrée dans le gouvernement de Nicolas Sarkozy qui aurait eu comme avantage de déconsidérer définitivement ce dernier.
Reste aussi à envisager la création d’un musée Claude Allègre entièrement consacré à ses foucades, à ses erreurs et à ses obsessions. Un jour, une telle exposition permanente pourrait faire recette, comme les personnages grotesques dans les foires d’autrefois. Il pourrait y démentir en boucle que Galilée s’est bien trompé en affirmant que vitesse de chute d’un corps n’est pas proportionnelle à son poids contrairement à ce que disait Aristote. L’académicien prouve allègrement le contraire et sa chute n’en finit pas de s’accélérer.
Et enfin, il pourrait servir d’épouvantail lors de la manifestation à Copenhague des écologistes lors de la manifestation pour la sauvegarde du climat le 12 décembre prochain.
Dernière solution : le lâcher au pôle nord pour surveiller, avec Michel Rocard, la fonte des glaces et l’agonie des ours blancs.
Je n’aurais pas la cruauté de suggérer un suicide public : c’est déjà fait, mais le prononstic vital n’est pas encore avéré.
Je sais bien qu’il ne faut jamais tirer sur une ambulance. Sauf quand le malade est au volant...

dimanche 16 août 2009

En acceptant le CPNT, l'UMP renie le Grenelle de l'environnement et part en guerre contre la biodiversité

Dimanche 16 août

La fusion imminente de l’UMP avec les chasseurs fous de CPNT, Chasse Pêche Nature et Traditions, ne présage rien que bon pour la nature et les espèces sauvages. Il y a quelques semaines j’écrivais ici que « La biodiversité, tout le monde s’en fout ». A commencer par CPNT qui ne considère l’espace naturel que comme la gestion d’un gigantesque terrain de chasse au sein duquel il faut privilégier la présence des cerfs, des chevreuils, des sangliers, des lièvres et des lapins pour que les chasseur, majoritairement citadins, aient une petite chance d’atteindre leurs gibiers. Plus est la densité d’animaux est importante à l’hectare, plus la (grande) partie des chasseurs maladroits et ignorants de la nature venus de la ville, ont des chances de faire mouche. Certains gibiers deviennent tellement abondants qu’ils remettent en cause la régénération naturelle des forêts en dévorant les arbustes, dévastant les cultures et se promenant sur trop de routes en provoquant de graves accidents. Sans oublier tous les animaux d’élevage que des spécialistes vont commencer à relâcher dans quelques jours pour que les sociétés de chasse, publiques ou privées, puissent offrir de « beaux tableaux » à leurs actionnaires. Dans la Sologne voisine de mon jardin, il est plus facile d’attraper un faisan avec le contenu d’un sac de maïs qu’avec un fusil : quelques graines suffisent pour attirer l’animal alourdi par l’engraissage et incapable de fuir après avoir été « imprégné » de l’homme qui le nourrit. Cela doit s’appeler, selon le code rural, « chasse avec un engin prohibé ». Mais comment s’appelle le plaisir de flinguer des animaux apprivoisés avant de les étaler sur la pelouse devant un château ou un manoir ? Et comment qualifier des gens qui ne se sentent virils qu’avec un fusil et un treillis ? Dans quelques semaines, les campagnes vont retentir de coups de feu puisque la loi prévoyant une journée de « non chasse » par semaine a été abrogée par l’UMP sous la pression des chasseurs qui font la loi alors qu’ils ne sont plus guère de 1,2 millions.
Mais revenons à CPNT qui, en parfait accord depuis des années avec une partie des parlementaires UMP, ne pense qu’à élargir les périodes d’ouverture de la chasse au mépris des directives européennes et à augmenter le nombre des espèces chassables. En éliminant, illégalement ou par le biais d’arrêtés discrets, tout les « nuisibles ». Pour un chasseur est « nuisible » tout ce qui représente une (supposée) concurrence. De la même façon que les pêcheurs de ce parti politique, avec la complicité de leurs (nouveaux) amis de l’UMP, écument les zones humides en détruisant les loutres. Ce qui entraîne, autre exemple, le déclin de nombreuses espèces d’oiseaux migratrices. Et sous le mot « tradition » du sigle se cachent des méthodes de chasses dites traditionnelles qui sont soit cruelles soient dévastatrices.
Depuis des années, y compris du temps de la gauche au pouvoir et de Dominique Voynet, les chasseurs et leurs complices font pression sur le législateur pour refuser les limitations à leurs « droits » et grignoter les espaces protégés comme les réserves naturelles et les parcs nationaux. Grâce à l’action de Fédérations de chasse richissimes qui se gèrent sans le moindre contrôle de la loi et dans la plus grande opacité grâce au système électoral particulier utilisé pour « l’élection » de leurs responsables ; un véritable déni démocratique soutenu par l’UMP et quelques parlementaires socialistes. Au nom d’une imposture : le « droit de chasse » serait, selon eux, un acquit de la Révolution. Ce qui est parfaitement faux : la Révolution n’a élargi le droit de chasser exclusif de la noblesse qu’aux « propriétaires » et il faudra plus d’un siécle pour qu’il soit étendu à tous les manants. Je conserve encore le souvenir cuisant des remontrances et des menaces, dans les années 60, au coeur du Morvan, quand le garde-chasse du chatelain-propriétaire des terres surprenait mes oncles, qui n’avaient que le statut de métayer, à poser des collets ou à poursuivre des lièvres dans la neige avec un gourdin. J’ai même gardé son nom en mémoire : de Fontenay. Comme la dame au grand chapeau...
Les fous de CPNT, et je laisse de côté leurs penchants ultra-réactionnaires de la droite la plus extrême, sont aussi ceux qui animent la bataille contre les loups et les lynx dont la fonction de prédateurs, comme celles des ours dans une moindre mesure, est indispensable à l’équilibre de ce qui reste de biodiversité. Ils retrouveront dans le gouvernement et à l’UMP des gens comme Christian Estrosi qui bataillent depuis des années pour l’élimination totale du loup. Il n’est pas le seul et à chaque fois que ce sujet revient à l’Assemblée nationale, se succèdent à la tribune les parlementaires, imbéciles ou opportunistes, qui réclament les mêmes mesures en assénant des contre-vérités. La plus classique : les loups (comme les vipères....) auraient été rè-introduits en France avec une camionnette conduite par une ancienne directrice du Parc National du Mercantour ou relâchés grâce au va et vient d’un hélicoptère depuis l’Italie ! Que ceux qui doutent de la réalité de ces discours consultent les comptes-rendus analytiques des débats à l’Assemblée nationale depuis 1998. Ces parlementaires répètent stupidement les anathèmes de l’Eglise qui, du Moyen Age au XIX éme siécle, a condamné le loup parce qu’il représentait le diable. Les textes anciens que je suis en train de relire pour la rédaction d’un prochain livre sur Canis Lupus sont édifiants : ils sont parfois repris mot pour mot par les membres de CPNT et des parlementaires.
Mais j’entends déjà une remarque : les loups tuent des brebis. C’est exact : entre 2500 et 3000 moutons par an. Alors que les chiens errants ou fugueurs, d’après la FNSEA, en tuent et blessent plus de 100 000 chaque année. Avec une différence importante : depuis 1993 toutes les brebis tuées ou blessées par les loups sont remboursées après (indulgente...) expertise alors que nul ne paie les dégâts des chiens. Dernière observation : ce n’est pas agréable de voir son troupeau attaqué mais tous les bergers qui, ne cédant pas aux pressions excités de CPNT et de certains chambres d’agricultures, prennent des mesures de gardiennage et de surveillance, avec enclos et chiens patous échappent aux attaques du loup. Ce que font 95 % des éleveurs italiens des Abruzzes et les éleveurs espagnols cohabitant avec un peu plus de 2000 loups.
Voici donc quelques traits de l’idéologie prédatrice des gens qui vont rejoindre l’UMP pour avoir le droit, électoral, de s’installer avec eux dans les Conseils Régionaux. Ce qui risque évidemment de réduire à néant les (maigres) avancées du Grenelle de l’environnement. Comme vont le montrer les discussions parlementaires de la rentrée qui risquent de réduire la petite efficacité des réserves et des parcs nationaux.
Une précision pour conclure: je ne suis pas chasseur mais ne suis pas adversaire de la chasse lorsqu’elle est pratiquée dans le respect des lois, françaises ou européennes, et d’une éthique adaptée au XX1 éme siécle. Chacun son plaisir. Et les écologistes qui veulent interdire la chasse sont aussi stupides que leurs adversaires: sur un territoire d’où l’on élimine systématiquement les prédateurs, elle est absolument nécessaire. Je pense en outre que la petite partie des chasseurs qui battent la campagne en compagnie d’un chien à la recherche d’un animal qu’ils mangeront ensuite, connaissent, respectent et aiment bien le milieu naturel. Ils ne sont hélas plus la majorité, il s’en faut de beaucoup. Le congélateur a fait des ravages et incite aux massacres collectifs.
L’admiration pour ceux qui chassent en sachant chasser parce qu’ils savent humer le vent, repérer des traces infimes, deviner les habitudes des animaux, mène à une autre réflexion : je suis pour la protection des derniers braconniers ; pour les descendants de Raboliot, pas pour ceux qui tirent sur tout ce qui bouge juchés sur des 4 X 4 ; de préférence de nuit. Soit pour la viande qu’ils revendent discrètement à des restaurateurs, soit pour le plaisir de faire des cartons. Le vrai « braco », celui de Corse ou d’ailleurs, est un homme qui connaît intimement la nature, qui a suffisamment de talents et de savoirs pour trouver l’endroit où il peut à coup sur le piége ou le collet. Dans mon esprit, les derniers braconniers constituent une espèce à protéger, au même titre que le loup, l’ours, le lynx, le chat sauvage, la genette, la loutre, la fouine, la belette et la marte...