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Journaliste depuis 30 ans, à la fois spécialiste des pays en proie à des conflits et des questions d'écologie,de protection de la nature et de société; derniers livres publiés: Guerres et environnement (Delachaux et Niestlé), L'horreur écologique (Delachaux et Niestlé), "La Grande Surveillance" (Le Seuil),une enquête sur tous les fichages (vidéo, internet, cartes bancaires,cartes médicales, telephone, etc). Et enfin "Enquête sur la biodiversité" (ed Scrinéo, coll Carnets de l'info). Aprés 20 ans au Journal du Dimanche, collabore désormais à l'hebdomadaire Politis et à Médiapart.

mercredi 16 juin 2010

marée noire Lousianne: BP nettoie plus son image que la mer

Mercredi 16 juin

Retour aprés une absence due à une surcharge de travail mais vous pouvez aussi me retrouver sur le blog des rédacteurs de Politis.fr


BP plus soucieuse de nettoyer son image que la mer

Trois jours après l’explosion, l’énorme machine à communiquer de BP s’est mise en route. Pas de réunion d’un club de loisirs, d’une association locale de pêcheurs, de résidants, d’écologistes, de scientifiques locaux, de volontaires de nettoyage sans que se pointe par miracle au moins un représentant de la société pétrolière. Avec des arguments, des paroles rassurantes ou des promesses. Avec en prime, tout ce qu’il faut pour « améliorer l’ordinaire » des réunions et des associations. Besoin de matériel, d’un réfrigérateur, d’un ventilateur, de chaises, d’eau minérale, d’une boisson gazeuse, d’un ordinateur, d’un vidéo projecteur ou d’un tableau ? Pas de problème, le représentant de BP passe un coup de fil et le matériel débarque par miracle. Ritournelle de ces envoyés très spéciaux auprès de la population qui s’inquiète : « nous avons tous un problème, nous allons le résoudre ensemble ». Les séances de formation des « nettoyeurs de plage » sont organisées par des instructeurs puisés chez BP. Si les protecteurs de la nature se réunissent pour évoquer les dégâts sur les animaux, qu’il s’agisse des tortues ou des oiseaux, un « naturaliste » payé par la société se pointe à la réunion. Pour relativiser intelligemment les inquiétudes. Un journaliste spécialisé de la Nouvelle Orléans fait les comptes : depuis le début plus de 3000 salariés de BP parcourent la région. Pas une mairie ni une administration n’échappent à cette « marée humaine ». Partout les salariés du pétrolier distribuent des argumentaires simplifiés vantant leurs efforts et minimisant les dégâts. Avant chaque tentative de juguler la fuite, ils mettent en scène la réussite imminente. Au niveau local et national, y compris auprès de la Maison Blanche qui ne demande qu’à être rassurée, ils organisent un spectacle permanent qui détourne l’attention de la pollution au profit de leurs efforts.
Objectif des communicants dirigés par Irvin Lipp : persuader que BP fait tout ce qu’elle peut, qu’elle est décidément poursuivie par la malchance. En entretenant un véritable suspens non pas sur la pollution mais sur ses efforts « désespérés ». Les communicants alimentent les projets les plus fous : par exemple celui d’une gigantesque île artificielle qui serait construite le long des côtes pour empêcher le pétrole de les atteindre ; idée aussi irréaliste que saugrenue reprise sans vérification par l’administration américaine. L’essentiel : mettre en scène l’activisme de la société : au point de persuader les responsables de l’administration de la Maison Blanche qui ne demande, comme la majeure partie des Louisianais, qu’à croire au miracle. BP accumule dans les médias et chez les politiques les « preuves » de sa bonne volonté...tout en faisant analyser les prélèvements d’eau polluée par un laboratoire qui travaille régulièrement pour l’industrie pétrolière et notamment pour...BP.
L’équipe d’Obama, pour laquelle la communication a toujours été une seconde nature, a d’autant plus été battue par ces champions de la communication qu’elle n’a jamais vraiment compris à quel point les hommes de BP étaient proches de la Maison Blanche. Mais les uns et les autres sont, comme souvent en cas de marée noire, peut-être sur le point d’être déstabilisés par une image : celle du pélican engluée de pétrole qui hante désormais tous les médias...