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Journaliste depuis 30 ans, à la fois spécialiste des pays en proie à des conflits et des questions d'écologie,de protection de la nature et de société; derniers livres publiés: Guerres et environnement (Delachaux et Niestlé), L'horreur écologique (Delachaux et Niestlé), "La Grande Surveillance" (Le Seuil),une enquête sur tous les fichages (vidéo, internet, cartes bancaires,cartes médicales, telephone, etc). Et enfin "Enquête sur la biodiversité" (ed Scrinéo, coll Carnets de l'info). Aprés 20 ans au Journal du Dimanche, collabore désormais à l'hebdomadaire Politis et à Médiapart.

mardi 19 juillet 2011

Fukushima quatre mois aprés: la décontamination impossible

Mardi 19 juillet


Chaque jour les journaux japonais découvrent un nouveau problème insoluble lié à la catastrophe de Fukushima et aux rejets radioactifs des trois réacteurs toujours en fusion lente et de la piscine de stockage des barres d’uranium qui continuent à polluer le pays. La question qui agite actuellement le pays est simple : comment décontaminer des milliers de kilomètres carrés. La réponse est aussi simple : c’est impossible. Autre aspect des difficultés : il faudra encore au moins un an pour que les 100 ou 150 000 tonnes d’eau radioactives qui n’ont pas réussi à refroidir les réacteurs en fusion soient totalement neutralisées. Ce qui leur laisse largement le temps de s’infiltrer dans le sol et de s’écouler vers la mer où nul ne sait comment se propage ou bien s’accumule la radioactivité. Restera, autre problème, à trouver ce qu’il est possible de faire avec les boues hautement radioactives qui ont déjà été extraites des 10 % d’eaux traitées.
Sur des surfaces de plus en plus importantes, les eaux des rivières, des étangs, des lacs, les terres, les arbres sont plus ou moins contaminés, au hasard des vents, de la neige de la fin de l’hiver et évidemment de la pluie. Il va pleuvoir une partie de cette semaine et un vent d’environ 20 kilomètres heure va encore transporter une partie de la radioactivité non fixée vers d’autres villes et vers la capitale puisqu’il souffle du Nord-Est depuis plusieurs jours. A Tokyo, il est officiellement recommandé de ne pas donner l’eau du robinet aux jeunes enfants. Car les pollutions radioactives gagnent progressivement les nappes phréatiques qu’il est évidemment impossible de dépolluer.
En surface la pollution inégalement répartie mais dont il n’existe pour l’instant aucune carte, est riche en iode, en strontium, en plutonium et césium. Il y en a pour tous les goûts et pour toutes les maladies à venir. Cette pollution touche également tous les animaux, y compris les oiseaux qui partent au loin. Elle concerne aussi les constructions, qu’il s’agisse d’habitations, d’écoles, de bâtiments industriels ou de fermes ; et de tout ce qu’elles contiennent Beaucoup de bétail a été abattu mais il a fallu arrêter l’incinération qui relâchait de la radioactivité dans l’air. Pour éliminer la contamination du sol, il faudrait au moins ôter une dizaine de centimètres d’épaisseur, éliminer la végétation et couper tous les arbres. Pour les bâtiments, quels qu’ils soient, ils doivent être détruits par des équipes soigneusement équipés et dotés de machines qui deviendront, comme à Tchernobyl, autant de (nouveaux) déchets nucléaires. Mais comme, éventuellement, pour les millions de tonnes de terre décapés, autre question à laquelle nul ne trouve la moindre réponse : où mettre ces monceaux de débris radioactifs ?
A Tchernobyl, la solution fut plus simplement résolue : l’Ukraine étant vaste et sa population relativement plus modeste, la zone contaminée a été sacrifiée. Tous les habitants ont été évacués et les déchets sécurisés (plus ou moins) sur place. Quand aux villages et à la grande ville de Pripiat abandonnés, leurs constructions restent sur place ; comme la centrale et ses quatre réacteurs. Pas question de démolir ce que le temps mettra à bas avant que les radioéléments cessent d’être dangereux, transformant une cité moderne de 50 000 habitants en une nouvelle Pompéi. Mais au Japon dont les 126 millions d’habitants s’entassent déjà sur 372 000 kilomètres carrés, l’espace est rare. Donc, impossible de laisser la zone contaminée se désertifier et impossible de trouver de grandes surface pour isoler des montagnes de terres et de déchets.
Le gouvernement parait s’orienter, malgré les protestations des militants anti-nucléaires de plus en plus nombreux, vers une décontamination superficielle qui lui permettrait de laisser revenir des habitants à leurs risques et péril mais sans autoriser l’élevage et l’agriculture...