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Journaliste depuis 30 ans, à la fois spécialiste des pays en proie à des conflits et des questions d'écologie,de protection de la nature et de société; derniers livres publiés: Guerres et environnement (Delachaux et Niestlé), L'horreur écologique (Delachaux et Niestlé), "La Grande Surveillance" (Le Seuil),une enquête sur tous les fichages (vidéo, internet, cartes bancaires,cartes médicales, telephone, etc). Et enfin "Enquête sur la biodiversité" (ed Scrinéo, coll Carnets de l'info). Aprés 20 ans au Journal du Dimanche, collabore désormais à l'hebdomadaire Politis et à Médiapart.

dimanche 16 décembre 2012

Bonne chance à Nicolas Hulot !!!

dimanche 16 décembre




            Comme j’adore que les militants du Front de gauche et quelques paléo-gauchistes enfermés dans leurs tours d’ivoire et leur vocabulaire ancien, me fassent la morale, je vais une fois de plus dire tout le bien que je pense de plus en plus de Nicolas Hulot, le nouvel ambassadeur-planète de François Hollande. Ceci alors qu’il y a quelques années je polémiquais avec lui par journaux interposés, écrivant notamment qu’il n’avait aucune culture politique. Il est en train de prouver le contraire.

            Ce qu’il a expliqué depuis quelques jours, notamment sur l’antenne de France inter mercredi matin pour justifier sa « mission », me semble largement plus passionnant que les contorsions et les palinodies des Verts qui, en s’agitant le cul sur au moins trois chaises, courent le risque de se casser définitivement la figure. Et de déconsidérer la réflexion et l’action écologiques.

            Quand on revient de Doha, que l’on y a été le témoin de la cécité de la plupart des délégations à la conférence climatique, quand on a pu mesurer la gravité de la schizophrénie dont ils sont tous plus ou moins atteints, quand on y a écouté la ministre de l’écologie Delphine Batho ânonner des fiches techniques auxquelles elle ne croit pas vraiment et dont surtout elle parait mal saisir la portée humaine et écologique, on se dit que le discours militant de Nicolas Hulot à la mérité de la clarté et surtout de la passion qui veut et peut convaincre. 

            Car son analyse n’est pas, elle, marquée par la schizophrénie des diplomates du climat : celle qui consiste à faire pleurer Margot sur les ravages du dérèglement climatique avant de refuser d’adopter la moindre mesure contraignante de sauvegarde de la planète. Parodiant la célèbre phrase des adversaires de l’abolition de la peine de mort au XIX ème siécle, « Que messieurs les assassins commencent », la plupart des pays, expliquent qu’ils accepteront de réduire leurs émissions de gaz à effet de serre...quand les autres le feront. Mais nul ne se précipite vraiment pour faire, voire simplement pour financer, le premier pas de ceux qui n’ont pas les moyens de leurs angoisses...

            Ce n’est pas parce que Nicolas Hulot a découvert la terre en avion ou en hélicoptère à une époque où tout le monde se moquait des avertissements sur le réchauffement de la planète, ce n’est pas non plus parce qu’il a travaillé pour TF1, ni encore parce que sa Fondation a accepté des mécénats contestables quand on estime que l’argent a une odeur, qu’il n’est pas légitime. D’abord parce qu’il dit des choses passionnantes, parce que de toute évidence il y croit et enfin parce que tout individu a le droit de changer, d’évoluer, de trouver son chemin de Damas.

            Je ne sais pas si Nicolas Hulot réussira à convaincre les Grands de ce monde, d’être moins stupides, moins repliés sur les intérêts à court terme de leurs pays, mais je crois qu’il réussira au moins à repassionner les opinions publiques, à commencer par celle de la France, pour la cause de la planète. Comme lorsqu’il explique que la transition écologique représente aussi une transition sociale, qu’il est idiot et pervers d’opposer les risques grandissants du chômage et de la pauvreté à l’urgence de sauver notre environnement, de maintenir la biodiversité et d’écarter un jour la menace des catastrophes naturelles. Quant un pays choisit résolument, par exemple, de lancer d’immenses chantiers pour l’isolation, il crée des emplois, il réduit la fracture énergétique entre les citoyens et il contribue à la sauvegarde de la terre.

            Donc, Nicolas Hulot, écarté (peut-être pour son bien en fin de compte...) de la course à la présidentielle par les apparatchiks d’Europe-Ecologie-Les Verts manipulant des nouveaux adhérents et des gauchistes antédiluviens, peut être utile. A la fois aux socialistes empêtrés dans leur héritage productiviste et à la cause de ceux qui rêvent d’une authentique transition écologique débarrassée de projets aussi ringards que l’aéroport de Notre Dame des Landes et d’une énergie nucléaire qu’il a logiquement qualifier d’énergie du passé.

            Mais il y a du boulot...Et Hulot a eu raison de regretter à France Inter que personne ne descende dans la rue pour manifester contre l’immobilisme en matière de lutte contre les responsables du dérèglement climatique.

vendredi 7 décembre 2012

Fin en demie-teinte d'une conférence climatique trop virtuelle pour être honnête

Vendredi 7 décembre, 20 h, heure locale





            Jusqu’au bout les couloirs de la conférence climatique de Doha, ont bruissé de rumeurs et d’informations plus ou moins vérifiables. Ce n’est évidemment pas une première pour une conférence internationale de cette ampleur. Mais cette année, une grande nouveauté : les textes imprimés ont totalement disparu ! Les Nations Unies et les responsables Qataris ont formellement interdit toute distribution de communiqués, de textes et de brochures. Les délégations ou les (rares) ONG présentes qui avaient outrepassé cet ukase le premier jour ont été menacées de représailles voire de retrait de leurs accréditations.  Pierre Radanne, ancien directeur de l’Ademe et aujourd’hui responsable de l’agence Facteur 4 qui conseille de nombreux pays africains émergents, a ainsi été interpellé par deux policiers des Nations Unies parce qu’il glissait dans les boites à lettres des délégations une « note de décryptage » présentant en 90 pages les enjeux de Doha. Un document en anglais ou en français qu’il distribue depuis des années et est très apprécié par les scientifiques et des politiques du climat. Il a fallu l’intervention d’un haut responsable des Nations Unies pour qu’il soit exceptionnellement autorisé à distribuer une centaine d’exemplaire de son étude.

            Plus de papiers, donc, sur les tables, sur les comptoirs ou dans les présentoirs. Les prises de position, les discours, les communiqués, les explications, les lieux de réunion, les annonces de conférence de presse, les appels, les protestations ont disparu dans le gouffre insondable d’Internet. Explication avancée par les organisateurs : économie de papier. Inutile de leur rappeler que le papier est recyclable et que cette « économie » parait dérisoire dans l’énorme palais des congrès dont les milliers de mètres carrés sont en permanence climatisés. Manifestement les services de communication des Nations Unies sont enchantés par leur idée et râlent si on leur parle de Green Washing.

            Donc, pour les délégations, pour les participants, pour la presse, pour les représentants de la société civile, il ne reste plus que la rumeur ou d’erratiques messages Internet. Plus invérifiable que les papiers distribués et facilement censurable. Les responsables de l’ONU se récrient : « mais tout se trouve sur Internet ! Vous nous faites un procès moyenâgeux, il faut vivre avec notre temps ». Certes... Mais le moindre écrit, offert aux passants de cette agora climatique, avait ses chances d’être lu, de produire ses effets. Le discours du plus méconnu des chefs d’Etat ou de gouvernement pouvait, à tête reposée, intéresser, offrir une idée originale ou une solution. Les communiqués pouvaient faire réfléchir. Tous ces messages gisent désormais dans un puits sans fond dans lequel les recherches d’informations sont soit épuisantes, soit vouées à l’échec.

            Le fonctionnement d’une conférence sur le climat est donc devenu virtuel et les textes se croisent sur la Toile pratiquement sans se rencontrer. D’abord parce que personne ne sait vraiment où les trouver et aussi parce que nul ne sait à qui les envoyer. La COP 18, puisque tel est son nom, est à la fois sourde et quasiment muette. Penser qu’il puisse s’agir d’une bonne solution pour écarter toutes les opinions divergentes, relève évidemment de la mauvaise foi journaliste. Pourtant, depuis qu’ils sont arrivés ici, les journalistes et les participants naviguent dans le noir. Quand aux ONG, en dehors des grands noms associatifs « embedded » dans la grande machine onusienne qui les réduit au rôle de courroies de transmission des idées reçues et des pressions diplomatiques, elles sont également sourdes et muettes. Elles sont d’ailleurs fort peu nombreuses à Doha. Pour la première fois depuis Kyoto, la société civile est quasiment absente. Et les négociations sérieuses qui ont commencé lundi dernier et se sont peu à peu intensifié intensifier à partir de mardi avec l’arrivée des ministres et des chefs de gouvernement se sont déroulées à l’abri des regards et de la contestation. Non plus au rythme des textes qui circulent mais à celui des rumeurs. Et ces dernières sont encore nombreuses vendredi soir au moment où il semble apparaître que le Protocole de Kyoto sera prolongée, y compris avec l’Australie, mais que le Fonds Vert destiné à aider les pays les plus pauvres sera remis à plus tard...

            Il n’aura pas été question non plus, malgré les demandes pressantes des rares ONG présentes, d’évoquer longuement la très rapide fonte des glaces de l’Arctique qui a pourtant été confirmée il y a quelques jours par l’étude de 47 experts réunis par la NASA et le professeur Andrew Shepered de l’université anglaise de Leeds. Elle établi pourtant une relation entre cette fonte accélérée et l’occurrence d’ouragan comme celui qui a récemment ravagé New York et la Côte est des Etats Unis. Explication simple : les USA, la Canada et la Russie se réjouissent de l’ouverture, une grande partie de l’année désormais, du passage du Nord-Ouest pour leurs navires. Et pour leurs recherches pétrolières off shore dans les eaux glaciales de ces régions.

            L’Europe, pour sa part, n’a jamais pu ni s’exprimer d’une seule voix ni disposer d’une marge de discussion cette semaine, en raison de l’attitude de la Pologne qui a décidé de bloquer toutes les avancées possibles pour conserver le droit d’utiliser sans restriction ses réserves de charbon sans encourir la moindre sanction.

            Il n’aura pas été question d’évoquer publiquement  la reconnaissance par le HCR, le Haut Comité des Nations Unies pour les Réfugiés, la question des « réfugiés climatiques » déjà évalués à une cinquantaine de millions. Chiffre qui pourrait atteindre 300 millions au cours des vingt prochaines années affirment les experts du GIEC, le Groupement International pour l’Etude du Climat.

            Des experts qui, comme le Français Jean Jouzel arrivé ici dimanche, n’auront pas eu la possibilité de faire distribuer dans la Centre de conférence, leurs plus récentes analyses pour inciter à la société civile à faire pression sur les politiques. Sous couvert de « modernité » et d’écologie, la décision de l’ONU et du Qatar de supprimer le papier, s’apparente donc bien à une censure...

 




mercredi 5 décembre 2012

Mercredi 5 décembre, Doha, conférence climatique






            Au cours de leur premier point presse, mercredi 5 décembre,  Delphine Batho, Pascal Canfin et Serge Lepeltier, ambassadeur du Climat du gouvernement français se sont affirmés relativement optimistes sur les résultats de la réunion, alors que de la conférence se termine vendredi soir avec possible prolongation dans la nuit. C’est évidemment leur métier d’être confiants. Bien que ni la question du renouvellement du protocole de Kyoto, le seul outil contraignant pour les pays industrialisés, ni la question du Fond Vert destiné à aider les pays les plus pauvres et les plus vulnérables ne sont pas résolus. 

            En privé, des membres de la délégation française se montrent beaucoup moins optimistes, regrettant que tous les points soulevés dans les discussions se trouvent immédiatement englués dans d’autres discussions et des agendas qui consistent à renvoyer les solutions à d’autres conférences. Notamment à celle de 2015 qualifiée de définitive et décisionnelle par les deux ministres qui ont rappelé que la France était candidate à son organisation. L’Europe ne s’y opposant pas, la décision de principe pourrait être prise rapidement. Ce qui est certain, c’est qu’un tel événement à Paris permettrait de réunir plus d’associations environnementales. Lesquelles brillent par leur absence à Doha où la « manifestation » organisée il y a deux jours dans le centre ville a réuni quelques centaines de personnes.

            Le lieu français de cette réunion mondiale n’a pas encore été fixé mais un participant à ce point presse a suggéré que le bâtiment nécessaire à sa tenue pourrait avantageusement se substituer au  futur aéroport de Notre Dame des Landes. Un projet dont le sénateur vert Ronan Dantec, également présent à Doha, pense qu’il pourrait être reporté aux Calendes Grecques faute d’argent et de consensus : « à chaque fois que les Bretons se sont mobilisés en masse, le pouvoir a finalement reculé. François Mitterrand et Lionel Jospin en ont donné à plusieurs reprises l’exemple ».

            Au cours de ces explications  en petit comité, Pascal Canfin a également déclaré que la France donnait l’exemple en matière d’aide à la lutte climatique aux pays les plus pauvres : six milliards d’euros pour les énergies renouvelables. En prenant comme exemple le typhon qui est en train de ravager les Philippines il a  aussi ajouté: « devant les manifestations récentes du réchauffement de la planète, personne ne comprendrait qu’il ne se passe rien ici. Nous n’avons par le droit d’être pessimiste et il  nous faut agir ». Tout en précisant que la seule décision de l’Europe qui ne représente que 13% des émissions mondiales de gaz à effet de serre, ne serait pas suffisante et qu’il fallait que d’autres pays respectent leurs engagements. Pour sa part, la ministre de l’écologie, fidèle à son langage technocratique, a surtout évoqué le détail, souvent incompréhensible et éloigné des réalités, des négociations de marchands de tapis qui se déroulent depuis deux jours. Et Pascal Canfin a ajouté à propos des engagements de la France et de l’Europe: « le problème n’est pas d’être le premier de la classe mais d’augmenter le niveau moyen de la classe ».

            Il ne reste de cette rencontre qu’une seule certitude : la France renouvelle son engagement dans le Protocole de Kyoto, la ministre de l’écologie a été claire sur ce point. Mais la perspective d’une prochaine réunion en Pologne en 2013, le pays qui paralyse actuellement les décisions de l’Europe sur le climat, n’est pas plus encourageante que les réunions de Cancun et de Doha, deux villes donnant l’exemple d’un gaspillage énergétique insupportable quand on pense aux centaines de victimes de déplorent actuellement les Philippines.