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Journaliste depuis 30 ans, à la fois spécialiste des pays en proie à des conflits et des questions d'écologie,de protection de la nature et de société; derniers livres publiés: Guerres et environnement (Delachaux et Niestlé), L'horreur écologique (Delachaux et Niestlé), "La Grande Surveillance" (Le Seuil),une enquête sur tous les fichages (vidéo, internet, cartes bancaires,cartes médicales, telephone, etc). Et enfin "Enquête sur la biodiversité" (ed Scrinéo, coll Carnets de l'info). Aprés 20 ans au Journal du Dimanche, collabore désormais à l'hebdomadaire Politis et à Médiapart.

mercredi 23 décembre 2015

Fukushima: les aveux glaçants du directeur de la centrale

Dans un entretien accordé le 20 décembre à l’Agence Associated Press, le responsable de la réparation de la centrale de Fukushima a avoué qu’il était dans l’incapacité de prévoir quel serait le coût de la mise en sécurité des installations, et de fixer une date pour que les réacteurs fondus cessent de menacer la santé des salariés de l’entreprise et les habitants de la région alors que les bâtiments accidentés continuent à polluer les sous sols et l’atmosphère.
Masuda Naohiro a même ajouté qu’il ignorait si, quand et comment les nouveaux robots pourraient réussir à explorer les débris des réacteurs fondus pour faire le point sur la réaction qui se poursuit en dégageant une chaleur d’environ 100° et des émanations radioactives. Il a également reconnu qu’il devait faire face à une véritable « zone de guerre ». Toutes déclarations qui contrastent avec les affirmations du gouvernement japonais répétant régulièrement que la situation est entièrement sous contrôle.
Le responsable de la Tepco, la société propriétaire de la centrale, a précisé que les ingénieurs ne savaient même pas où se trouvaient les débris des réacteurs ni comment il serait possible de les extraire. Il ignore également si les travaux nécessaires pourront être commencés avant une dizaine d’années. Avec cette précision :
« Une nouvelle science devra être inventée pour commencer le nettoyage et il faudra pour cela prendre en compte les risques courus par les salariés et l’environnement. »
D’autant plus que des éléments radioactifs continueront à fuir dans les nappes souterraines, dans la mer et dans l’air.
 L'un des bâtiments réacteur en septembre 2015 toujours inaccessible aux techniciens (Photo : Claude-Marie Vadrot)
L’un des bâtiments réacteur en septembre 2015 toujours inaccessible aux techniciens (Photo : Claude-Marie Vadrot)
Des aveux qui contredisent radicalement les propos rassurants et les mensonges proférés par des responsables de la centrale lors de la visite des installations et de la région par Politis à la fin du mois de septembre dernier. Des propos de « propagande » que démentaient d’ailleurs la plupart des analyseurs automatiques de radioactivité mis en place sur le chantier, les combinaisons spéciales portées par de nombreux techniciens et l’abandon sur place de centaines de voitures et d’engins de chantiers fortement contaminés.
En conclusion Masuda Naohiro, qui travaille depuis 30 ans pour la Tepco, a assuré que, désormais, il annoncerait aussi bien les bonnes que les mauvaises nouvelles. Mais, pourtant, il n’a rien dit sur la bonne vingtaine de millions de tonnes de déchets radioactifs entassés sous de simples bâches dans la campagne environnantes…
Une faible partie des 20 millions de tonnes de terre et de déchets radioactifs entassés dans la zone évacuée (Photo Claude-Marie Vadrot)
Une faible partie des 20 millions de tonnes de terre et de déchets radioactifs entassés dans la zone évacuée (Photo Claude-Marie Vadrot)

samedi 5 décembre 2015

COP 21, ça chauffe aussi au Bourget et les diplomates s'engueulent...



A en croire Laurent Fabius (tiens…on n’a toujours pas entendu la ministre de l’Ecologie française …), en lui remettant à l’heure fixé, un texte confus et touffu qui ne comporte plus que 48 pages sur les 54 qui leur était proposé, les négociateurs du Bourget ont accompli le tache qui leur avait été assignée. Alors que selon ses dires et selon les responsables des Nations Unies, il ne s’agit que d’une ébauche. Ce qui est évident puisqu’il reste dans l’accord proposé aux ministres pas moins de 750 mots, verbes et phrases entre crochets sur lesquels aucun compromis n’a pu être trouvé. Notamment à propos de l’article 2 qui inclut le respect des droits humains qui a été remis entre parenthèses au dernier moment vendredi.

Mais surtout, la plupart des témoignages concordent sur ce point, les discussions de jeudi et de vendredi ont été houleuses, donnant lieu à des éclats de voix et des engueulades plutôt inhabituelles dans les cénacles d’ordinaires plus feutrés des diplomates. Elles sont, notamment le résultat des frustrations et des colères des pays du Sud, réunis dans le groupe des 77, qui trouvent qu’on les mène en bateau. Certains, expliquent notamment les observateurs de l’association CARE, qui travaille sur les conséquences des dérèglements climatiques à travers le monde, ont très vigoureusement protesté, voire menacé de partir, si la question des « Pertes et dommages », restait évoquée de façon trop générale et insuffisante. Ce qui illustre la tendance lourde des nations riches et industrialisées à se préoccuper prioritairement de leurs populations en oubliant les pays les plus pauvres laissés bien seuls face aux dégâts entrainés par une situation climatique dont ils ne sont en aucun cas responsables vu le faible niveau de leurs émissions de gaz à effet de serre. Les affrontements ont illustré le fossé entre les discours lyriques des chefs d’Etat et de gouvernement et les instructions données à leurs diplomaties.

En fait il n’existe pour l’instant aucun accord crédible en vue et il se dessine une curieuse alliance « objective », par exemple, entre les Etats-Unis et des pays pétroliers comme l’Arabie Saoudite. Tout au long des discussions, ces deux pays ont agit comme si leur intérêt immédiat était de limiter les impacts sur leurs économies fortement « carbonées » et de satisfaire tous les lobbies de l’énergie. En témoigne encore la disparition de la moindre allusion au recours aux énergies renouvelables. La partie de poker menteur qui se poursuit depuis des années dans les conférences climatiques a été plus hypocrite et plus violente que jamais. Le ton des affrontements verbaux des derniers jours en est la preuve accablante. 

Demain et officiellement à partir de lundi, les réunions entre les ministres de l’environnement, pourrait reprendre le cours de ce dialogue de sourds sur le même ton et avec la même violence, laissent entendre des hauts fonctionnaires des Nations Unies. Même si un certain nombre d’associations françaises et internationales font semblant de croire, pour justifier leur existence et leur présence que « l’on est sur la bonne voie »…
(A suivre…)

dimanche 15 novembre 2015

L'echec d'une vie de journalisme



                Les attentats meurtriers à Paris, la perspective de l’arrivée au pouvoir régional du Front National et de ses loups fascistes mal déguisés en agneaux, en attendant peut-être pire au niveau de tout le pays, le très possible échec de la COP 21 placée sous haute surveillance et les difficultés de la société civile et du mouvement naturaliste et environnementaliste pour manifester avant le conférence climat, cela fait beaucoup pour un journaliste qui, depuis une quarantaine d’années, se bat et écrit pour éviter tout cela. Beaucoup trop même. De quoi inciter au découragement et au renoncement…
                J’ai l’impression d’avoir été, sans m’en rendre compte, aussi inutile et aussi nul que les politiques : des soi-disant « Républicains » aux Verts en passant par les Socialistes. En le voulant pour certains ou sans le vouloir pour d’autres, nous sommes tous en échec. En échec mortifère, en échec sans doute irréparable. Face aux fous de Daesh bien entendu mais aussi face à tous les autres fous qui animent les lobbies financiers et industriels qui souhaitent surtout que rien ne change,  que notre monde et celui des musulmans de France et d’ailleurs, continue à se suicider en se soulant de belles paroles et d’indignations stériles. Quand je relis les déclarations publiques des sénateurs américains niant le réchauffement climatique au nom de la Genèse ou la Bible ou les élucubrations des orthodoxes russes sur l’évolution de notre planète, quand je me rends compte que les fous de dieu n’habitent pas seulement en Syrie, en Irak, au Pakistan, en Afghanistan ou en Arabie Saoudite.
                J’éprouve une sensation de fin du monde dont je suis aussi responsable que les autres, parce que, sur tous ces sujets, je n’ai pas su expliquer ou informer. Il parait, nous dit-on, qu’il ne faut pas « avoir peur ». Je sais par une longue expérience des guerres, des guérillas ou des situations insurrectionnelles que la peur peut parfois être bonne conseillère et inciter à la prudence. Mais cette fois j’ai l’impression que cela ne suffira pas. La peur d’autres attentats, aussi prévisibles que dévastateurs, l’angoisse de voir la planète se dégrader inéluctablement sous les effets de la pollution et des émissions de gaz à effet de serre, la certitude que les derniers événements se traduise par un affaiblissement de ce qui reste en France (et ailleurs) de garanties démocratiques, la crainte que les meurtres aveugles se poursuivent en France et au Moyen Orient ne suffira pas à écarter les dangers. L’agitation stérile des politiques retombant en quelques heures dans leurs égarements verbaux en apporte une nouvelle preuve, la pression de l’ex-président demandant le report de la Cop 21 en est la dernière illustration.
                En ce dimanche, avant de regagner mon quartier du XI° arrondissement de Paris, je suis désespéré par l’ampleur de notre échec, de mon échec. Tel qu’il s’étale depuis vendredi soir dans la logorrhée qui s’étire dans les images et les interventions de BFM qui illustrent à merveille notre impuissance…


mercredi 11 novembre 2015

Climat: le premier rapport sur le réchauffement a 50 ans



                Les pays industrialisés ont commencé ce lundi à Paris, en compagnie du le ministre du pétrole saoudien, leur course de lenteur et d’astuces diplomatiques vers la COP 21 pour éviter de prendre des décisions. Et le Congrès des Etats Unis explique plus que jamais dans la presse comment et pourquoi la majorité de ses membres torpilleront les décisions éventuelles du Président Obama : il signer sans doute un accord a minima que son pays ne ratifiera jamais…
Il y aura pourtant ce jeudi 12 novembre, exactement 50 ans qu’un président américain a reçu le premier rapport scientifique détaillé annonçant tous les dangers du dérèglement climatique lors déjà en cours. Ce travail scientifique « Rétablir la qualité de notre environnement » préparé par un Comité de savants et d’économistes qui avait été nommé par le Président Kennedy et maintenu par son successeur après son assassinat, comportait un important chapitre sur les dangers de l’accumulation du dioxyde de carbone (CO 2). Ce texte, explique aujourd’hui le professeur de l’Université de Stanford, Ken Caldeira, qui l’a exhumé et attentivement lu, envisageait tous les dégâts aujourd’hui constatés : depuis la fonte des glaciers jusqu’à l’élévation des niveaux des mers, en passant par le réchauffement global, les tornades et cyclones plus violents et l’acidification des océans.
                Un rapport qui a ensuite été aussi bien ignoré par les autorités américaines que par les responsables des Nations Unies qui ont fait semblant de le découvrir dans les années 80. Sans en tirer, en 1988, une autre conclusion que la création du GIEC, un organisme scientifique que les uns et les autres espéraient voir rapidement enterré dans les profondeurs de la bureaucratie onusienne. Mais qui leur a échappé sous la pression de scientifiques intègres et indifférents aux pressions diplomatiques des membres du G 7 organisées par les Allemands, les Américains et les pays du Golfe.
                Résultat, en dehors des décisions de réduction en trompe l’œil votées à Kyoto en 1997 et ignorées par la plupart des pays industrialisés, il ne s’est pas passé grand-chose en une vingtaine de « conférences climat » et l’année 2015 sera probablement « proclamée » la plus chaude depuis que les relevés météo existent, juste après la fin de la conférence de Paris. Les pressions se faisant insistantes auprès de l’Organisation Mondiale de la Météo pour qu’elle évite de fournir prématurément et officiellement l’information qui ne fait plus de doute pour les scientifiques…
                Pourtant, au cours de la réunion parisienne qui s’annonce, il ne sera pas question de science, de recherche, de dégâts ou de victimes. Les négociations seront avant tout économiques, politiques et diplomatiques. Il ne faudra en effet pas moins de douze jours pour tenter de supprimer le bon millier de parenthèses et de verbes au conditionnel que contient encore le texte de 30 pages qui sera soumis aux plénipotentiaires de 195 pays dont les représentants évoquent déjà la capitale où ils se réuniront une fois de plus l’année prochaine.

dimanche 25 octobre 2015

Climat: conférence de Bonn, l'hypocrisie de l'ONU et l'impuissance des ONG



Le climat des pré-négociations sur  le dérèglement climatique qui viennent de se terminer à Bonn était aussi chaud qu’obscurci par d’épais nuages de langue de bois comme en témoigne le communiqué final de l’ONU dont il faut rappeler qu’elle est responsable des conférences sur le dérèglement climatique depuis  35 ans. Un texte de 55 pages souvent incompréhensible qui masque notamment que les discussions ont chauffé entre les pays industrialisés et les nations émergentes qui ne souhaitent pas « payer » les obstinations et les dégâts des nations riches ; et que personne ne veut s’engager et résister aux lobbies énergétiques et pétroliers. Un communiqué qui évite soigneusement de préciser que le « préaccord » n’est est pas un puisque, pour sauver la face, les négociateurs y ont laissé plusieurs centaines de parenthèses contenant tous les désaccords, y compris ceux qui portent sur la conjugaison des verbes. Car dans un texte diplomatique il existe une différence considérable entre « devraient » ou « doivent », celle qui sépare le bon vouloir d’un pays signataire de l’obligation sous peine de sanctions. Sans oublier les astuces de traduction à partir de l’anglais (langue de travail) permettant de masquer certains différents. Rappels nécessaires pour apprécier le traditionnel enfumage des Nations Unies qui n’aiment pas avouer les impasses et les échecs…

« Les gouvernements du monde se sont pleinement approprié le projet de texte de l'accord, un texte équilibré qui constituera le point de départ pour le dernier round de négociations. Les négociations reprendront à Paris lorsque les gouvernements se retrouveront au Sommet sur les changements climatiques de Paris, du 30 novembre à 11 décembre 2015. La Secrétaire exécutive de la CCNUCC Christiana Figueres a déclaré que le projet de texte comprend des options supplémentaires qui reflètent les préoccupations des pays en développement. « Nous avons maintenant un texte qui appartient aux Parties, qui est équilibré et complet. Le défi pour les gouvernements est de le ramener à une structure beaucoup plus concise, claire et cohérente en vue de son adoption à Paris ».  

L’Ambassadrice française pour les changements climatiques Laurence Tubiana a déclaré: « Nous avons un texte gérable pour la poursuite des travaux à Paris. Bien que beaucoup de travail reste à faire, le texte est une bonne base pour les négociations et les négociations doivent commencer dès le premier jour de la conférence ».  Mesdames Figueres et Tubiana ont convenu que le processus politique entre aujourd’hui et le début du Sommet de Paris sera au cœur du succès de la réunion. Une réunion ministérielle de pré-COP aura lieu dans la capitale française au début du mois de novembre pour travailler plus avant sur les questions politiques de haut niveau concernant le projet d'accord ».

L’autre problème c’est aussi que la plupart des ONG, surtout  les plus importantes et les plus installées, manient exactement la même langue de bois que les plénipotentiaires, même si les arguments et les appréciations diffèrent bien que dilués dans une imprégnation « responsable ». Les Nations Unies ont bien peur de la réalité pour avoir expulsé ces représentants de la société civile lors de la conférence de Bonn. Ils sont en vérité bien inoffensifs, comme en témoigne l’extrait du communiqué de l’organisation internationale Oxfam. Elle et beaucoup d’autres paraissent avoir été contaminés ou anesthésiés par des années de fréquentation des diplomates du climat. Donc, l’opinion publique ne les entend pas plus ou pas mieux que les délégués officiels. Et les manifestations auront bien du mal à masquer les récupérations multiples de la société politique et industrielle française qui fait feu de tout bois avec la COP 21 qui leur servent surtout à faire oublier leurs responsabilités.

« Nous avons aujourd’hui les bases textuelles pour qu’un accord ambitieux et équitable soit signé à Paris, mais nous manquons pour l’instant clairement de volonté politique pour y arriver. « A 6 semaines de la COP21, deux visions de l’accord de Paris se dessinent. D’un côté, un accord  qui fait le choix du plus petit dénominateur commun et ne répond pas à l’étendue des besoins des populations les plus vulnérables. De l’autre, un accord ambitieux et équitable, qui souligne l’importance de l’adaptation pour les populations les plus vulnérables au changement climatique. Il s’agira d’ici Paris de choisir les bonnes options. Les pays en développement ont été clairs sur le fait que la présidence française sera jugée sur la place donnée aux financements climat dans l’accord de Paris. Cette question est pourtant encore aujourd’hui une équation à multiples inconnues.

Les décideurs politiques doivent passer à la vitesse supérieure afin de rehausser l’ambition en termes de réduction des émissions et de s’assurer que les financements pour l’adaptation des populations les vulnérables soient bien mis sur la table. Surtout l’accord ne peut entériner le déficit actuel de financement de l'adaptation alors même que tout indique que les engagements actuels nous maintiennent sur une trajectoire de l'ordre de 3°C, qui serait dévastatrice en termes d’impacts»

Les pays réunis à Bonn et qui doivent se retrouver à Paris, ne réussiront effectivement pas à prendre des décisions entrainant un ralentissement du réchauffement. Les effets à la fois de la résignation politique et l’offensive du monde des affaires et de l’industrie, notamment pour nous vendre encore plus de nucléaire. Mais cela fait des années que les ONG le répètent sans dépasser la faible audience de leurs membres et sans changer leur vocabulaire. D’autant plus que plongés comme lors des précédente conférences dans les discussions sur les virgules et la conjugaison des verbes, les diplomates n’évoqueront pas en séance les dérèglements climatiques en cours, avec leurs cortèges de réfugies, de morts et de dégâts. Aussi bien en France, qu’aux Etats-Unis, en Afrique ou en Asie.



vendredi 9 octobre 2015

Fukushima:reportage effrayant dans la centrale accidentée



                Plus de quatre ans après l’accident qui a affecté trois de ses réacteurs, la découverte, sous étroit contrôle, de la centrale sinistrée de Fukushima où s’affairent des milliers d’ouvriers intérimaires et des centaines de techniciens, reste un choc angoissant. Le désordre y règne toujours et l’image obsédante des centaines d’énormes cuves pleines d’eaux contaminées, rappelle que la question de la pollution n’est pas réglée et que fréquemment, notamment lors des pluies diluviennes qui ont frappé la région à la mi-septembre, la contamination continue à atteindre le sous-sol et la mer : passant sous la plage où, vision saisissante, deux réacteurs- heureusement à l’arrêt lors du tsunami- avaient été construits parce que la Tpeco avait fait des économies pour assurer leur refroidissement. Sans tenir compte de l’éventualité d’un tsunami.
Autre question non réglée que les visiteurs découvrent en dépit des précautions des « guides » qui contrôlent la prise de photographies: la maitrise des trois réacteurs en partie fondus. Non seulement nul homme et nul robot ne peut aller évaluer les dégâts et apprécier l’état du magma de combustible nucléaire, mais les bâtiments n’ont pas été réparés. Pour cause de radioactivité trop importante. Seule la piscine ou refroidissaient les barres de combustible usagées a été sécurisée. Les responsables avaient promis la construction d’un sarcophage de protection pour 2019, mais ils n’osent plus avancer une date car ils ne peuvent pas l’envisager tant qu’ils ne sauront pas exactement dans quel état sont les réacteurs  et si la température ne va pas brusquement remonter au dessus des 100 degrés officiellement annoncés. Il suffit de se souvenir, pour être sceptique sur l’avenir, qu’il a fallu plus d’une dizaine d’années au consortium formé par Vinci et Bouygues pour construire et assembler le nouveau sarcophage destiné à coiffer un seul réacteur de la centrale de Tchernobyl et qu’il n’est toujours pas en place. Pour un coût qui devrait dépasser deux milliards d’euros en grande partie payé par la BERD, la Banque Européenne pour la Reconstruction et le Développement. Les responsables de la centrale affirment qu’ils ne connaissent pas le montant des travaux déjà engagés.
                Que le retour à la « normale » dans les réacteurs de Fukushima soit désormais « envisagé » pour l’horizon 2040, se lit dans l’état du chantier où fourmillent des hommes dotés de masques et de combinaisons de protection côtoyant d’autres ouvriers arborant un dérisoire masque en tissu sur la bouche. Guère étonnant que depuis le début des travaux, la Tepco, ait déjà « usé » une centaine de milliers de salariés. Des intérimaires, sans qualification pour la plupart, atteignant les limites –non révélées- de leur exposition quotidienne à la radioactivité. Nul ne connait non plus, tout au moins officiellement, les dégâts, maladies ou décès, de cette exposition permanente
                Pourtant, ces travailleurs évoluent dans un paysage de cauchemar où la radioactivité évolue de mètre en mètre, atteignant des sommets prés des réacteurs accidentés. Les hommes, les camions et les grues travaillent dans un univers de déchets rouillés, de voitures et d’engins contaminés dont nul ne parait savoir quoi faire. Tous les véhicules du personnel présents sur place au moment de l’accident rouillent doucement sur les parkings depuis quatre ans et demi. Les milliers d’arbres du pourtour de la centrale irradiés du pourtour lors de l’explosion des bâtiments ont simplement été coupés et couchés aux abords de la clôture qui délimitent les frontières des installations. Ils attendent, comme les dizaines de millions de tonnes de terre grattée entassés dans les anciens champs de riz de la région, recouverts de bâche insuffisante à empêcher les ruissellements et les infiltrations dans les nappes souterraines.
                Entre les tas de déchets, les ferrailles rouillées, les cuves de rétention d’eau, serpentent des centaines de tuyaux et de câbles que les Japonais devront un jour décontaminer. Dans un désordre indescriptible, le long de routes étroites que parcourent des norias de camions d’où sortent parfois des nuages de poussières. Comme un résumé de la course contre la contamination menée par les ingénieurs de l’entreprise. Ils assurent qu’ils progressent mais n’en fournissent aucune preuve. Toutes les blessures de la catastrophe restent visibles. Et le projet d’injecter un mur de glace dans le sol pour contenir les infiltrations qui se poursuivent vers la mer, n’est pour l’instant qu’une méthode sous expérimentation. Les spécialistes de la Tepco, en sont encore au stade du bricolage et des tâtonnements, qu’il s’agisse de leur environnement industriel pollué ou des réacteurs fondus grillent en quelques minutes les robots téléguidés envoyés les explorer tant les radiations restent fortes…